Introduction
Vous la connaissez, elle officie dans le plus grand secret sur les internets et forge à chaque coup sa légende. Elle ne laisse derrière elle qu’une terre désolée et aride où rien ne repousse. Elle frappe fort, déterre les éléments pertinents et enfouit les autres jusqu’aux abîmes de la croûte terrestre. Son nom fait trembler ceux qui savent qui elle est, oui, aujourd’hui, elle est de retour dans nos contrées, je ressors Pipou, la pelle à casser du cliché.
Aujourd’hui elle va affronter une des plus belle tartine qu’il m’ait été donné de voir. Cependant je dois être précis en introduction afin d’éviter à ce billet d’avoir l’air d’un lynchage public. Je l’ai déjà expliqué (dans ces articles : La démarche photographique et La règle du Game), quand je me suis mis sérieusement à la photographie, j’ai essayé de faire les choses correctement. C’est passé notamment par une déconstruction des clichés que j’entendais un peu partout sur la photographie, pour construire ma propre réflexion autour d’elle, et la vision qui en découle. Pour cela, mon meilleur outil a été la bibliographie, et la conséquence de ça est le Blog que vous lisez actuellement, là, maintenant.
Et déconstruire ces clichés, ça a longtemps été un moteur du Blog, et c’en est encore un d’ailleurs, ça a abouti à des articles comme :
- Et j’ai quitté les internets
- Pour en finir avec les clichés sur la photographie
- Comment détester malin : tous nos conseils et astuces
- Y a-t-il des bons et des mauvais photographes ?
- Doit-on sauver le mauvais goût ?
- Pour en finir avec le matériel
Bref, tout ça pour dire, que quand je lis/entends un truc qui me paraît vraiment stupide, j’ai énormément de mal à ne pas écrire dessus, à ne pas utiliser Pipou pour le déconstruire, pour essayer de revenir à des choses plus cohérentes (tant au niveau de l’histoire de la photographie et de ses pratiques, que pour la logique en elle-même). Et là, aujourd’hui, maintenant, au moment où j’écris ces lignes, je suis sans doute tombé sur un jalon de la connerie. Une petite marque d’or, dans cette belle frise chronologique qui allait des premiers hommes à Donald Trump. Et ça, Pipou, elle n’aime pas ça du tout, elle vient toquer à ma porte, et je sais qu’il est l’heure.
La vidéo dont je vais vous parler porte le titre « Comment devenir un mauvais photographe », l’auteur y présente 10 idées qui feront de vous un mauvais photographe. Bien évidemment (et ce n’est pas le sujet) il faut comprendre l’inverse de ce qu’il dit, le ton étant clairement ironique, et donc entendre les 10 conseils qu’il donne pour devenir un bon photographe. C’est d’ailleurs de ce qui est implicitement dit que je vais partir dans l’argumentation, histoire que ça soit un peu plus clair/fluide pour vous lecteurs. Comme vous vous en doutez à ce stade de l’article, je suis en profond désaccord avec ce qui est dit, et je trouvais ça intéressant de déconstruire ces idées une par une, pour voir ce qui se cache derrière et comment au final, tout ça n’a pas de sens.
Quoiqu’il en soit, je dois clarifier quelques points avant de commencer :
- Je ne connaissais pas l’auteur de la vidéo avant de faire l’article. Je n’ai rien contre lui et me fiche éperdument de qu’il est personnellement, de ce qu’il a fait, des likes qu’il engrange etc. Je déteste l’ab hominem (confondre une personne avec les idées qu’elle présente) et donc je n’en ferai pas moi-même ici.
- Je ne m’intéresse qu’au fond de la vidéo, aux arguments développés. Le reste ne m’intéresse pas du tout, et ne sera pas abordé ici.
- Je n’ai pas lu les commentaires de l’article, pour ne pas être influencé (positivement ou négativement) dans mon écriture, encore une fois, je ne pars que de la vidéo.
- Les titres des parties sont les arguments implicitement formulés, pas ceux tels qu’ils sont dit dans la vidéo (j’ai enlevé l’ironie). C’est plus clair ainsi.
- Il n’y a rien de « gentil » ou « méchant » dans cette démarche. La personne ayant posté la vidéo est, selon toute vraisemblance, un adulte bien formé et conscient de ses actes, je me permets juste d’ouvrir un débat. Sa vidéo est publique, cet article l’est aussi, et la boite à commentaires ouverte.
Ceci étant dit, je ne vous cache pas que ça va quand même piquer un peu. Parce que bon, je n’ai pas pour habitude d’y aller avec le dos de la main morte, et ce n’est pas aujourd’hui que je vais changer ça. Prenez le mercurochrome, regardez la vidéo, et on démarre.
Il ne faut pas utiliser les modes automatiques / semi-automatiques
Bon, là première chose qui me fait mal, c’est quand même de commencer une liste de conseils par de la technique. Je veux dire, merde, y’a tellement de choses plus importantes avant ça (on le verra en conclusion). Je déteste parler de technique, et honnêtement, je file des M&M’s à celui qui trouvera un article ou même, allez, un paragraphe sur ce sujet en dehors de celui-ci sur le Blog. Mais bon, exercice oblige, on va en discuter un peu.
Pour commencer, je rappelle qu’on paie nos chers petits boîtiers une fortune, justement pour les algorithmes à l’intérieur qui font un excellent travail. Les exemples pris dans la vidéo sont des cas extrêmes où oui, ils tombent en rade, ou ils sont à côté de la plaque, ce qui est de toute façon rattrapable en post-production en considérant la dynamique des capteurs sur le marché. Donc on est en train de dire qu’on a un système qui marche très bien 95% du temps, mais que pour les 5% où il n’est pas fiable, il faudrait revoir toutes nos pratiques et s’en priver : sérieusement ? A ce tarif là, autant acheter des argentiques, au moins ça fait économiser pour s’acheter des trucs plus utiles, comme… des livres.
A mon avis, ce culte du mode manuel est encore un héritage foireux de la période de l’argentique et du « c’était mieux avant », parce que concrètement, le mode manuel (en dehors de certains cas très précis comme les poses-longues etc.) n’a absolument plus aucun intérêt. Toutes mes photographies sont prises en priorité ouverture (je tiens à maîtriser la profondeur de champ) ou en priorité vitesse pour la photographie de rue, parce que je photographie dans des conditions dégueulasses (c’est à dire le métro) et que la seule chose qui m’importe c’est d’avoir au moins un sujet net.
Mais ça, vous me direz que ça n’est que mon avis, avis de petit photographe parmi des centaines d’autres sur internet. Et vous auriez raison. Mais du coup, pour enfoncer le clou, tel Ponce Pilate, on va passer à l’échelle au dessus : la question des modes de l’appareil n’a eu aucun impact sur l’histoire de la photographie. Seul le résultat compte. Personne ne s’est jamais émerveillé d’une photographie parce qu’elle était prise en mode manuel et pas autrement, d’ailleurs, personne ne pose jamais cette putain de question.
Martin Parr, figure iconique de l’agence Magnum photographie au reflex, j’adore son travail teinté d’humour britannique et on le retient pour ça, pas pour la position de la molette sur son appareil quand il a déclenché. Ça n’aurait rien changé à son travail et tout le monde s’en fiche.
Il faut suivre des cours sur la photographie
J’ai envie de dire, que s’il y a une vidéo qui m’en dissuaderait bien, c’est celle-là. L’auteur explique que la plupart des « pro » sont passés par là, et qu’étant donné qu’il y en a plein de disponibles sur internet, il n’y a pas de raison de ne pas en faire. Alors, loin de moi l’idée qu’il faut éviter d’apprendre des choses quand on se met à la photographie, c’est bien évidemment tout le contraire, mais il faut le faire avec justesse et mesure.
Pour commencer, je vous invite à lire ces deux paragraphes, dans les articles suivants (les liens y mènent directement) :
Ils traitent de la photographie professionnelle, et je ne vais pas reprendre tout leur contenu ici. Mais pour vous la faire courte, et pour ceux qui ont la flemme (je vous vois !), la photographie professionnelle est complètement antinomique de la photographie artistique car elle répond principalement à un cahier des charges, à une exigence de la part du client, une obligation de résultat, ce qui s’oppose frontalement au cœur de la photographie artistique : l’expression de soi (exception faite de certaines branches plus souples : photo-journalisme, mode, etc.). Donc dire qu’il faut se former parce que la plupart des « pros » le font n’est un argument recevable que pour les personnes souhaitant apprendre un métier ; pour les autres, les chemins sont très variés.
Je rappelle quand même que Sebastião Salgado, qui est un monument de la photographie contemporaine (quasiment devenu une icône sacrée de son vivant) n’a pas fait d’école d’art mais… d’économie. Donc oui, se former, apprendre les bases c’est bien, mais ne comptez pas que sur ça, et n’ayez pas pour référence/cible la photographie professionnelle.
Il faut analyser les photos des autres sur internet
PUTAIN ! Mais non ! Je croyais avoir été clair sur le sujet pourtant (ici), je pensais que c’était enterré, terminé, mais NON ! Tel un bon herpès, ça revient toujours. C’est fou ça.
Bon, on va donc revenir à la base. Évidemment qu’il faut analyser le travail d’autrui pour progresser/découvrir/apprendre, là on en fonce des portes ouvertes. Mais ça n’a rien avoir avec internet. Il faut bien comprendre comment ça fonctionne, la photographie sur le web : internet est une machine à likes, très efficace pour flatter les ego, c’est un endroit où il est très difficile de trouver de vraies critiques qui aident, et c’est surtout une véritable bulle qui formate ses usagers. A titre d’exemple la une de 500px :
Deux photographies d’Andreas Gursky :
Étudiez la photographie, mais celles des grands photographes, dans des livres, pas en farfouillant je ne sais quoi sur 500px ou Flickr. Il y a la bibliographie si vous avez besoin de conseils. Pour creuser ce sujet et éviter les redites ici, je vous invite à lire cet article sur le sujet : Et j’ai quitté les internets
Ensuite, l’auteur fait une petite digression et dit que « ça serait connu si les plus grand peintres avaient étudié le travail des autres pour progresser » (Il faut comprendre l’inverse, le ton étant ironique : Les grands peintres ont étudié le travail des autres pour progresser). Alors, encore une fois, même si on semble baigner dans l’évidence la plus pure, il y a une erreur de logique énorme dans cet argument. L’auteur utilise un argument d’autorité : les plus grand peintres ont étudié le travail des autres, ce sont des exemples (vu que ce sont les plus grands) et il faut donc faire pareil. Oui, mais… non, ça ne marche pas comme ça. Les plus grands peintres, allez au hasard prenons Picasso, fait justement partie des plus grands non pas parce qu’il a étudié les autres peintres (ce que font toutes les personnes débutant un art, sans tous devenir de grands peintres) mais parce qu’il a su trouver sa voie, une voie radicalement novatrice, ensuite. Il n’a pas rejoint « les plus grands » (et donc acquis son autorité) parce qu’il avait étudié le travail des autres pour progresser et atteindre ce statut, l’argument n’a pas vraiment de sens formulé ainsi.
Il faut sortir de la file d’attente
Ce que dit l’auteur, enfin développe à la suite de ce conseil, c’est que pour faire des bonnes photographies sur les lieux touristiques (et éviter d’avoir les « mêmes photos que tout le monde ») il faut sortir de la file d’attente, des sentiers battus, et aller voir un peu ailleurs. Dans l’absolu, il n’y a rien de mal à ça et c’est plutôt pertinent, mais c’est le concept qui est derrière qui me gêne un peu.
Je veux dire, être un bon photographe, si tant est que ça existe, ça n’est pas faire de bonnes photographies de tous les lieux qu’on croise toute notre vie. On y reviendra un peu en conclusion, mais le raisonnement est fait à l’envers ici. Produire des photographies intéressantes, ça passe par une réflexion, des choix, et ça se mène sur le long terme. C’est un projet (voir cet article : Construire un projet photographique). Donc quelque part, ça n’a rien à voir avec vos photographies touristiques, on s’en fout clairement. Personne ne vous demande d’être bon tout le temps, d’être au maximum de la qualité en permanence.
Pour ma part, je mène mes projets photo quand l’occasion se présente, et le reste du temps (en vacances par exemple), je fais de la « photographie souvenir », certes extrêmement clichée, comme tout le monde, mais que je suis content de ramener chez moi. De plus, ce genre de conseils ne tiennent pas longtemps dès qu’on pousse un peu : Est-ce qu’Hiroshi Sugimoto est un bon photographe, parce qu’il a fait un pas sur le côté ? Non. Bah voilà.
Il ne faut pas faire de photos de soi devant les monuments
Pour ce point, mes arguments seront les mêmes que précédemment. Personnellement, dans un zoo, j’adore faire des autoportraits avec les animaux, ça me fait beaucoup rire. Ça ne fait pas de moi un bon ou un mauvais photographe pour autant. Ça n’est pas le sujet. Si ça vous éclate de vous prendre en photo devant tous les monuments de France, faites-le. Et sait-on jamais, à coup de dérision et de répétition, ça pourrait même faire un projet photographique intéressant.
Il ne faut pas prendre des photos à hauteur d’homme
Ce conseil est du même acabit que celui dit du « petit pas de côté ». Sous prétexte d’atteindre l’originalité, et d’essayer au maximum de se différencier des photographies de la plèbe, l’auteur nous invite à varier la hauteur des prises de vues. Bien que dans l’absolu il puisse être pertinent de rappeler aux gens que leur corps dispose d’articulations, et qu’il est possible (sans surcoût) de s’en servir pour varier ses photographies, je doute quand même très largement que cela soit un vecteur fiable d’originalité.
Parce qu’au fond c’est quoi le projet ? L’auteur prend en exemple le Musée du Louvre, maintes fois photographiés, et qui pour lui devrait être photographié autrement qu’à hauteur d’homme (au ras du sol, en hauteur, que sais-je !) pour permettre au photographe d’être original. Si le projet c’est de faire le tour des lieux parisiens les plus connus à 4 pattes, je doute qu’on aille bien loin.
Encore une fois, c’est prendre le problème à l’envers. Votre technique ne vous rend pas original, c’est votre projet (disons mûri et personnel) et la technique qui en découle naturellement qui le font. Prenons un petit exemple pour la forme, Henri Cartier-Bresson a quasiment photographié de son point de vue toute sa vie, est-ce qu’il aurait été meilleur en faisant autrement ?
J’ai quand même un petit doute. Tout petit.
Faites attention à l’arrière plan dans vos compositions
Loin de moi l’idée de vous dire de mettre tout et n’importe quoi dans vos images, la photographie, ça n’est pas la fête du village. C’est sans doute le conseil le moins problématique de la vidéo, et dans le fond, je suis d’accord avec. Je tenais seulement à le nuancer, parce que selon ce que vous pratiquez, et bah ça n’est pas toujours possible. Pour reprendre l’exemple de la photo de rue, les choses bougent tellement vite, qu’on est déjà content d’avoir la scène que l’on souhaitait dans le cadre. Enfin, je parle du moment de la prise de vue, une fois chez vous pour faire la post-production, vous avez tout le temps de repérer le slip qui sèche et gâche ce si délicat portrait de Mamie.
Je photographie pour voir à quoi ressemble le monde une fois photographié.
Garry Winogrand
Enfin, il ne faut pas oublier que l’absence de contrôle et la part de surprise qui en découlent font partie du cœur de la photographie, comme le dit ce bon vieux Gary ci-dessus. Photographier, c’est aussi apprendre à découvrir le monde autrement, c’est quelque chose d’assez sympathique au final, dont il serait dommage de se priver en plébiscitant un irréaliste contrôle total.
Il faut faire attention à la composition
Il faut respecter la règle d’or, la règle des tiers, c’est ce que font les grands peintres de la Renaissance et compagnie
(L’auteur, dans la vidéo)
Ha ! Ha ! J’aime beaucoup quand on commence à parler de la règle des tiers et plus généralement des règles dans les arts. Quand j’entends/lis ça, j’ai souvent la même image qui me revient en tête : celle d’un homme tenant une pancarte avec écrit « J’ai lu un Tintin et c’était bien » et qui tenterait de pénétrer à Harvard pour donner des cours de philologie antique.
Honnêtement, je ne sais pas d’où il faut débarquer pour sortir des âneries pareilles. Mais pour vous expliquer ça en détails, on va aller déterrer un allemand. Oui oui, allez Pipou, on y va.
L’homme que vous voyez là est Hegel, un des philosophes centraux dans la philosophie du XIXe siècle. A partir de 1818, il commence un cours sur l’esthétique, qui a été édité en livre après sa mort. Si je vous raconte ça, c’est pour vous dire que ceci n’est pas du tout nouveau, et que bon, une idée qui a 200 ans, il serait quand même temps qu’elle rentre un peu dans les esprits. Dans son esthétique, Hegel nous explique qu’il n’y a aucune règle pour créer le beau, et que si on en avait trouvé une, ça ferait quand même belle lurette qu’on aurait commencé à s’en servir. Et c’est logique, pour définir ce qui est beau, nous devrions classer, inventorier, analyser, et conceptualiser tout ce qui est beau, ce qui est par définition impossible. Il ne peut donc y avoir de règle, de critère, de ce qui est beau ou pas. C’est un point de vue qui suit la pensée de Kant, auquel il répond en partie (j’en parle ici).
De même, Hegel nous dit que l’application des règles est l’héritage d’une vision ancienne de l’art, et que le travail qui résulterait de l’application de règles ne serait que formel, régulier, et qu’au final tout cela n’est bon que pour un travail mécanique. Comme fabriquer des portes. Et j’insiste, il a expliqué tout ça, il y a 200 putain d’années. Donc il y a un moment où il faut arrêter les conneries, arrêter de penser que des règles toutes faites vont vous simplifier la tâche, ou sont un dogme à suivre. Personnellement je ne m’en sers que pour une chose : je les active sur le smartphone de certains proches, qui s’intéressent peu à la photo, pour qu’ils reviennent avec des photos correctes de leurs vacances, et voilà.
Et puis bon, l’histoire de l’art va quand même dans ce sens. Certes, on peut observer des similitudes entres les époques, des courants, modes, tendances, mais les artistes qui marquent l’histoire au fer rouge, sont ceux qui s’en détachent, et créent des choses radicalement nouvelles (quelle que soit la forme que porte cette nouveauté). C’est par exemple ce qui a fait la renommée de Stephen Shore, sa capacité tant à photographier le banal, que son usage de la couleur, où l’image des Etats-Unis qu’il renvoie est loin de la grandiloquence auquel on est habitués.
Et que personne ne vienne me dire que c’est une bonne base pour débuter. Stephen Shore a vendu ses premières images au MoMa de New-York à 14 ans, il n’y a pas l’ombre d’une trace de la règle des tiers, du nombre d’or, ou de la cacahuète sacrée des Incas dedans.
Si le sujet vous intéresse, je vous invite à lire l’un des ouvrages suivants :
- Hegel, G. & Jankélévitch, S. (2009). Esthétique. Paris: Flammarion. (si vous aimez la difficulté)
- Abensour, A. (2016). La philosophie de l’art. Paris: Ellipses. (si vous voulez quelque chose de plus abordable).
- Ainsi que cette vidéo :
Il faut régler la balance des blancs à la prise de vue
Quand j’ai entendu ça, je me suis mis à avoir des palpitations. Je me suis dit : « Quoi ? Une 2e fois ? Je vais devoir parler une deuxième fois de technique dans un billet ? « . Mais bon, on a dit point par point, alors allons y.
Il est, de mon humble avis, complètement contre-productif, de se soucier de la balance des blancs à la prise de vue. L’auteur exagère énormément, cela ne prend pas 10 minutes par photo, loin de là. En utilisant Lightroom, il suffit de régler la balance des blancs d’une image (2 minutes) et de synchroniser toutes les similaires avec ce paramètre. Ou alors de laisser le logiciel faire, ce qu’il fait très bien (ce qui s’explique par l’énorme investissement en développement/recherche qu’Adobe a fait dedans, et justifie son grand succès). Donc comme pour le premier point, on ne va pas se casser la tête à faire soi- même, ce qu’un robot fait parfaitement bien à notre place. Ça serait comme revenir à la lessive à la main, et personne ne veut ça. Avant d’enchaîner, pour les plus sceptiques, je vous invite à découvrir ce tutoriel édité par Adobe.
Personnellement, je n’ai aucune idée de là où le réglage se trouve sur mon appareil (je déteste encore plus parler de matériel que de technique, donc je ne donnerai pas la marque, mais c’est pas un Kodak jetable en gros). Et je vis très bien comme ça, je pense qu’il faut toujours tendre à réduire la technique et les réglages au minimum à la prise de vue, afin de se concentrer sur l’important : ce qui se passe. Au final, on est dans la même veine que pour le mode manuel, c’est un autre héritage de l’époque de l’argentique, où en effet il fallait le faire à la prise de vue (c’était beaucoup plus difficile d’intervenir sur une pellicule que sur un raw), bref une sorte de mantra, que l’on se répète pour se rassurer, arrosé d’un fond de « c’était mieux avant ».
Il faut jouer avec la lumière
Dans cette dernière partie, l’auteur nous dit deux choses, la première c’est qu’il faut jouer avec la lumière (ce avec quoi je suis parfaitement d’accord), ce que selon lui, on ne peut pas faire en mode automatique. Bon, là, Pipou, j’ai eu du mal à la retenir, on revient à l’argumentaire que j’ai développé au premier point. Je rappelle (au passage) que peu importe le mode dans lequel vous êtes, cela n’a aucune influence sur la lumière devant vous, c’est encore une fois comprendre le problème à l’envers. Changer de mode vous permet d’avoir plus de contrôle sur la quantité de lumière qui rentre et la façon dont elle rentre, mais c’est tout, elle reste la même (en dehors du studio s’entend, où l’on contrôle tout). Et puis bon, même en mode automatique on peut sur-exposer/sous-exposer en cas de besoin, très facilement. Tout ça pour dire, que si après avoir vu la vidéo, vous imaginez qu’il suffit de tourner des boutons pour influencer la lumière sur vos images, vous vous gourez. C’est un tout : analyse, réflexion, compréhension, etc. Le reste en découle.
Enfin, dans un deuxième temps, l’auteur nous dit, tout gentiment : « Restes en mode automatique, pour avoir des photo banales qui ressemblent à celles de tout le monde ». On revient aussi à des arguments déjà développés, ce n’est pas une molette qui vous donnera ou non de l’originalité, ça se saurait quand même, pas plus qu’un petit pas sur le côté.
Conclusion
La photographie c’est facile, c’est ça qui est difficile.
Robert Delpire
Bon, me voilà à la fin de ce petit exercice de style. J’ai décidé de l’écrire directement après avoir vu la vidéo. J’ai écrit ce post assez rapidement, beaucoup plus que les billets classiques du Blog. Principalement par souci d’équité, je n’allais pas passer 15 heures à faire un billet en béton pour contredire un vidéo qui a pris 5 minutes à être tournée, et sûrement moitié moins à être préparée.
Je rappelle ce que je disais en introduction : si je souhaite quelque chose ici, c’est ouvrir un débat sur les points cités et ceux qui vont suivre. Ce billet ne constitue pas une attaque personnelle, mais bien une critique argumentée des idées présentées et de la vision de la photographie qu’elle suppose et diffuse. D’ailleurs, je suis intimement convaincu que l’auteur pensait bien faire, qu’il s’est sans doute un peu planté, et ça arrive à tout le monde, y’a pas de problème.
Enfin, pour que les choses soient vraiment égales, je vais moi aussi me prêter à l’exercice et donner ce qui seraient mes 10 conseils pour être un meilleur photographe (pas un bon, parce que si vous avez lu le billet que j’ai cité précédemment, je pense que ça n’existe pas).
- Partez toujours de vous. Commencez par réfléchir à pourquoi vous voulez faire de la photographie, quels sont vos projets, qui vous êtes et ce qui vous tient à cœur. Tout le reste (votre apprentissage de la technique, le matériel, les livres que vous achetez, etc.) doit découler naturellement de ça, et pas l’inverse.
- Vous êtes la seule personne à satisfaire. On se fiche des likes, on se fiche des règles, etc. Prenez les avis construits sur votre travail, mais commencez toujours par produire un travail qui vous rend heureux. Voir ce billet à ce sujet.
- N’apprenez que ce dont vous avez besoin. Vous n’avez pas besoin d’être des grands physiciens théoriques de la photographie, ni de connaître le fonctionnement de tout. Cela ne vous servira à rien (sauf à satisfaire votre éventuelle curiosité, et dans ce sens là bien sûr, ça ne pose pas problème).
- Vous n’avez pas besoin d’être bon en tout. Cela découle des points précédents, mais ne faites que ce qui vous plaît, jusqu’à atteindre le meilleur de vous-même. Votre portfolio n’a pas a être un catalogue de toutes les branches de la photographie.
- Achetez des livres et pas du matériel. Enfin, il va bien vous falloir un appareil photo à un moment donné, mais une fois que vous l’avez apprenez à vous en satisfaire. C’est dans les livres (voir la bibliographie) que vous trouverez de quoi progresser, vous inspirer, etc.
- Utilisez le temps. Le temps est votre meilleur ami. Vous n’avez pas besoin de publier des choses tous les jours. N’hésitez pas à mener des projets sur le long terme.
- Ayez votre appareil avec vous le plus souvent possible. Et avec cela une batterie d’avance, sinon ça ne sert à rien. Votre photographie doit refléter votre vie, vos goûts et non l’inverse. La meilleure façon de ne pas rater une occasion, c’est bien de l’avoir tout le temps sur soi.
- N’hésitez pas à construire vos projets. Certains photographes trouvent leur voie au fil de l’eau, pour d’autres il faut un peu de réflexion avant. Ou on peut alterner les deux. Tout est dit dans le billet dédié à ce sujet.
- Soyez créatifs. Je ne vais pas trop développer ce point, je prépare en coulisse un billet qui mentionnera ça. En attendant, vous pouvez lire ça : Comment booster sa créativité, autrement qu’avec de la drogue.
- N’ayez pas peur d’échouer. On ne retient qu’une ou deux images des plus grands photographes, et la plupart ont eu des carrières s’étalant sur plusieurs décennies. Donc ne vous mettez pas de pression inutile, travaillez, persévérez, mais continuez quoiqu’il arrive.
Ps : tous les commentaires et participations sont les bienvenus, sur chacun des points de ce billet. Seulement, j'ai juste une petite requête : évitez d'aborder la technique, ça me casse les pieds car c'est particulièrement ennuyeux et inintéressant.
J’ai principalement écouté cet album, pendant la rédaction de l’article :
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