Introduction
Si vous vous souvenez de l’article La démarche photographique, vous savez ce que sont les articles « poids lourd » du Blog. Au menu, peu de plaisanteries, de calembours et contrepèteries, on a un sujet, et on est là pour le traiter méthodiquement, point par point, et, si j’y arrive, de façon exhaustive. Il sera question aujourd’hui de la construction des projets photographiques, des vôtres, des miens, et de tous ceux pondus au fil de l’histoire.
C’est un sujet extrêmement complexe, les pratiques étant par définition propres à chaque individu. Ce que je fais et dis pour moi n’est déjà pas valable pour mon voisin, alors pour une foule de lecteurs, imaginez bien… Il ne s’agira donc pas de vous donner une recette toute prête, ce qui dans l’art n’existe pas de toute façon (méfiez-vous donc quand on vous en propose !), mais plutôt les clés d’un raisonnement qui vous permettront de construire quelque chose de propre et de vous exprimer.
Pour terminer par une analogie, ici point de taxi, mais plutôt de la mécanique. Apprenez à fabriquer votre voiture sur mesure, et allez où bon vous semble avec. Tournez la clé, on démarre.
Ps : Dans cet article, je considère que vous démarrez de 0. Donc je risque d'enfoncer quelques portes ouvertes, mais comme je l'ai dit, on sera exhaustif.
Pré-requis
Comme vous vous en doutez, un article pareil ne sort pas de derrière les fagots. Le Blog est avant tout un cheminement personnel et intellectuel qui accompagne ma pratique, et je vais m’appuyer ici sur quelques billets précédemment écrits. Afin de ne pas polluer le présent article par d’innombrables redites, qui pousseraient les lecteurs fidèles à un ennui mortel, voici donc ce que je vous conseille de lire avant de poursuivre :
Minimum syndical
- « Pourquoi » avant « Comment »
- Que photographier ?
- Y a-t-il des bons et des mauvais photographes ?
- Travailler en série
Lectures facultatives
- La démarche photographique
- Où est passée la connaissance sur la photographie ?
- Travailler en série II : Regard sur la jeune photographie européenne
- Je vous conseille aussi l’ouvrage : Shore, S. & Lablanche, D. (2010). Leçon de photographie la nature des photographies. Paris: Phaidon, présent dans la bibliographie, et plus généralement la partie Composition et Théorie.
Si vous voulez lire un peu plus, et démarrer totalement blindé, tout est ici : Archives. Si vous n’avez pas le courage ou le temps de lire tout ça, je vous en fais un résumé succinct ci-dessous, mais faudra pas venir se plaindre si, tel un Nokia 3310 chez Itinéris, vous ne captez rien. Voici les notions clés présentées dans les articles du minimum syndical :
- Vous devez toujours réfléchir au sens de vos projets, avant de réfléchir au matériel qui sera employé.
- Vous ne photographierez jamais que vous-même. Si un miroir reflète votre corps, la photographie renvoie vers votre âme. Tous conseils allant dans l’autre sens ne sont donc pas pertinents.
- Il n’y a pas de bons ou de mauvais photographes, car il est impossible de définir une échelle de valeur précise (sauf cas extrêmes) permettant de définir qui serait bon, ou qui ne le serait pas.
- Vos séries photographiques doivent être construites, que cela soit a priori ou a posteriori. Mais nous allons revenir en détails ici sur cette notion.
Maintenant que tout le monde est prêt et sur un pied d’égalité, on y va.
Idée générale
Nous voilà donc au cœur du sujet qui nous intéresse aujourd’hui. Malgré ce que le plan peut laisser supposer, un projet photographique ne se compose pas de 3 éléments mais de 4. Oui, je sais, si dès le début c’est le bazar, vous vous dites qu’on ne va pas y arriver, mais vous allez voir, c’est tout simple. Pour réaliser un projet photographique, vous avez besoin d’un sujet, d’un angle d’approche / traitement (j’utilise les deux termes sans distinction) et d’un choix technique. Et vous avez besoin de ces éléments dans cet ordre, et dans aucun autre, et encore moins inversé.
Ceux qui me suivent régulièrement savent principalement deux choses: j’honnis les règles en photographie, et je vois ce blog comme quelque chose de personnel et ne cherche donc pas à imposer quoi que ce soit à qui que ce soit. Mais, rien que pour vous on va faire une exception : il ne faut jamais commencer un projet par la technique. Jamais. Ainsi, vous ne devez jamais vous dire « Oh tiens, je viens de m’offrir un objectif macro, je vais faire un projet de macrophotographie ». C’est pas comme cela que ça marche. Cela reviendrait à choisir le matériel de sa maison avant d’en faire le plan.
Ceci étant clarifié, allons-y, et dans l’ordre messieurs dames.
Sujet
Le sujet, c’est la clé d’entrée de votre projet, c’est la base qui va être travaillée par les points suivants, un peu comme une matière première que vous allez tenter d’exploiter au mieux. Si vous n’avez absolument aucune idée de comment en trouver un, voici quelques éléments à considérer :
- Vous le connaissez probablement déjà : prenez une feuille blanche, et notez tous vos centres d’intérêt. Et je dis bien « centres d’intérêt », pas « passion absolue pour laquelle on est prêt à mourir ». Donc ça peut comprendre vos goûts, les lieux que vous aimez, les sujets qui vous intéressent (Histoire ? Politique ? Equitation ?), etc. Eh bien, vos sujets de prédilection se trouvent probablement dans cette liste, parce qu’un projet photographique vous allez le mener a minima pendant quelques mois, donc il faut quand même que ça vous touche un minimum.
- Il n’y a pas forcément besoin qu’il soit ultra précis au début, pas besoin de vous inquiéter de ça. Votre sujet, c’est quelque chose qui va s’affiner avec le temps, avec la pratique. Petit à petit, vous allez naturellement élaguer pour vous recentrer sur le cœur du sujet qui vous parle le plus. Donc, là maintenant, si vous vous y mettez après avoir lu l’article, si vous ne trouvez pas un sujet du style : Les confluents de la Seine et leur impact sur la croissance agro-économique du milieu du XIXe siècle, pas de panique.
- Il n’y a pas besoin qu’il soit unique, pour le dire autrement : on peut traiter un sujet 1 000 fois, ce qui importe c’est la façon dont vous allez le faire. Donc si vous avez une idée qui vous semble géniale, mais que vous vous dites « Oh non ! Diantre ! Cela a déjà été fait ! », eh bien… allez-y quand même.
Pour que tout ça soit un peu plus parlant, je vais prendre pour exemples les séries qui sont en ligne (après tout, ce sont celles que je connais le mieux !) et les compléter de ce que chaque partie rajoute. Ainsi, pour le sujet :
- L’image d’une ville : Les villes que j’ai visitées / dans lesquelles j’ai vécu
- Intercité : Mon trajet quotidien, le Rouen-Paris-Rouen.
- Graffitis : Les graffitis laissés dans la ville.
- Rouen : La ville de Rouen.
Ps² : ces projets ont quelques années maintenant et ne sont plus accessibles directement sur le site (seulement via les liens ci-dessus). Pour avoir des exemples plus à jour et surtout plus détaillés, je vous invite à lire les Making of que j'ai pu écrire.
Traitement / Angle d’approche
Le traitement, c’est ce qui va commencer à vos différentier des 1 000 autres personnes qui se sont intéressées au même sujet que vous. Parce qu’il est là , l’enjeu d’un projet au final,même s’il ne s’agit pas de viser l’originalité à tout prix, c’est une conséquence du fait que vous mettez de votre personnalité dans le traitement de votre projet, personnalité par définition unique et qui rend donc votre projet original. Comme je le disais précédemment, on peut traiter un projet 1 000 fois, et donc de 1 000 façons différentes via le traitement / angle d’approche que vous avez choisi.
Ainsi, le traitement :
- C’est la façon dont vous allez parler de votre sujet, comment vous le traitez : allez vous-être proche de lui ? Lointain ? Le mettre en avant ? Le critiquer ? Le rendre plus beau ? Le montrer tel qu’il est ? L’aimez-vous ? Allez-vous montrer votre sentiment pour lui ou rester neutre ? Etc.
- N’a rien à voir avec le traitement technique de vos images. Ce n’est pas la retouche, ce n’est pas le développement, ou toute chose s’en approchant. Je préfère le terme « Traitement » à « Angle d’approche », car je le trouve plus juste, mais il peut induire en erreur, je préfère donc utiliser les deux.
Le plus simple, pour bien comprendre ce qu’est le traitement, c’est de prendre deux travaux photographiques abordant le même sujet, et de comparer comment ils ont été traités par leurs auteurs. Prenons au hasard, la prostitution : le sujet a été traité par Txema Salvans (dans le projet The Waiting Game) et par Jane Evelyn Atwood. Dans le premier cas, le sujet est photographié à distance, on ne voit pas l’acte tarifé, les photographies s’approchent plus du paysage que du portrait, le tout soulignant la solitude de ces femmes attendant dans la banlieue des villes.
Le deuxième projet (enfin chronologiquement, le premier, mais là on s’égare) est beaucoup plus direct. Atwood a photographié les prostituées dans leur quotidien, les photographies vont droit au but : il n’y a pas de volonté d’esthétiser le sujet, son style est plus proche du reportage et de la photo de rue que du paysage, il est est aussi beaucoup moins neutre, il montre les choses sans pudeur. Atwood a aussi cultivé une certaine proximité avec elles, en entrant petit à petit dans les chambres pour photographier ce qui s’y passait.
Le sujet est donc le même (dans les deux cas, on sait très bien de quoi il est question), mais le traitement est complètement différent et donne à chaque projet un ton qui lui est propre. Le traitement c’est donc ça, une façon de travailler la matière première de votre sujet pour lui donner la direction que vous souhaitez.
Pour reprendre l’exemple précédent concernant mes séries, cette fois sujet + Traitement / angle d’approche, on a :
- L’image d’une ville : Les villes que j’ai visitées / dans lesquelles j’ai vécu, en une photographie à chaque fois qui en résume l’expérience. Le fil conducteur étant une ligne d’horizon, qui lie toutes les images entre elles.
- Intercité : Mon trajet quotidien, le Rouen-Paris-Rouen, photographié sous le prisme de la photographie de rue (j’aurais tout aussi bien pu prendre l’architecture). L’esthétique se veut directe et sans fioritures ni sur-esthétisation, comme le disait Cartier-Bresson : « La netteté est un concept bourgeois. »
- Graffitis : Les graffitis laissés dans la ville, que je photographie uniquement dans une surface carrée/rectangulaire, qui se répètent comme autant de tableaux.
- Rouen : La ville de Rouen, dans lequel je vis. A l’inverse d’Intercité, j’essaie de l’esthétiser, de redonner un peu d’ordre, via la photographie, à cette ville médiévale tordue. Adorant Rouen la nuit, j’ai tendance à privilégier les images assez sombres, et surtout qui sortent des lieux communs que l’on peut voir sur cette ville.
Technique
Pour commencer, il ne faut pas confondre la technique et le matériel (j’en parle dans ce billet), le matériel fait partie de la technique, mais la technique ne se résume pas au simple matériel. Ce terme générique englobe beaucoup plus, il comprend (en vrac, et sans être exhaustif) : le matériel (focale, boitier, etc.), la composition, le développement de vos images, les paramètres techniques. Bref, tout ce qui vous permet de produire concrètement vos images. De passer de la réalité à des petits octets sur un ordinateur, ou des grains d’argent sur la pellicule.
Le seul but de la technique, le seul et unique, est de servir ce que vous aurez décidé aux points précédents, et rien d’autre. La technique doit être l’esclave de vos rêves, et non l’inverse. Dans le cadre d’un projet photographique, elle doit être constante, c’est ce qui donnera une cohérence à vos images, fera qu’elles forment un tout et non une simple suite de photographies. Enfin, vous pouvez décider de faire l’inverse (traiter un même sujet avec toutes les techniques possibles), l’important ici étant de le décider, et que cela ne soit pas le fruit du hasard ou d’un manque de réflexion.
Pour finir avec l’exemple, la technique derrière chaque série est :
- L’image d’une ville : J’emploie indifféremment un peu tout le matériel que j’ai (tant les objectifs que les boîtiers), le but étant d’obtenir le rendu « neutre & intemporel » qui caractérise la série. J’essaie quand même de limiter les déformations optiques, qui à mon sens cassent l’esthétique que je veux leur donner. Les photographies sont très millimétrées, ce que j’accentue au post-traitement (bien caler les horizontales et verticales, etc.).
- Intercité : Là pour le coup je prends 95% des photographies avec la même recette : 24 mm (équivalent 38 mm sur plein format), à 1/125e ou 1/250e si la scène est lumineuse. Le but étant de figer le mouvement, mais non de l’effacer complètement. Etant assez influencé par Klein et la photographie de rue japonaise, je privilégie les images directes sans particulièrement chercher une esthétique parfaite. Le fond d’abord, la forme ensuite.
- Graffitis : Comme pour l’Image d’une ville, je fais cette série avec un peu tout, tant que je garde la cohérence de la série, basée sur la composition : un rectangle comprenant le graffiti. Dans cette série, toutes les images sont en couleur, que je garde assez neutre pour laisser parler la scène et non le traitement que je pourrais appliquer par dessus.
- Rouen : La prise de vue s’étalant sur assez longtemps maintenant (plus de 3 ans), j’ai un peu tout utilisé aussi. Le parti-pris technique est très similaire à celui de l’Image d’une ville (une photographie ordonnée, esthétique, voire asceptisée). La ville de Rouen étant par nature déformée, rien n’y étant droit, j’essaie de la tirer dans le sens inverse avec mon appareil. J’ai choisi le noir et blanc, pour donner un côté intemporel aux images.
Réflexions pratiques sur votre projet photographique
Vous risquez sans doute d’être déçus, mais tout ce que vous venez de lire ne suffit malheureusement pas. Il s’agit certes d’une base solide, mais d’autres paramètres sont à prendre en compte dans la création de votre projet photographique, et surtout dans la façon dont vous allez le tenir.
Pour reprendre une fois de plus la métaphore de l’introduction, si jusque-là nous avons vu comment construire une voiture, nous allons voir ici le code de la route qui va avec. Code de la route qui, rappelons-le, n’est pas une somme de règles n’ayant pour but que de vous casser les pieds, mais sert avant tout à vous empêcher d’aller dans le mur. Vous voyez l’idée.
Pourquoi construire un tel projet ?
Vous pourriez-vous dire, qu’après tout, construire un projet photographique ça ne vous dit pas grand chose, et que vous ferez ça un peu à votre sauce au fur et à mesure, en improvisant et en faisant fit de toute cohérence si ce n’est la personne derrière l’appareil. Après tout ça àal’air complexe et fatigant, et comme toutes les choses complexes et fatigantes, on est quand même sacrément tenté de les éviter.
En réalité, et même si c’est une bonne question, vous n’aurez pas vraiment le choix. Quoique vous fassiez, vous allez donc construire un projet photographique au fur et à mesure de votre pratique : il se constituera de la somme de vos photographies, organisée par le chaos. Votre projet sera juste bancal, et reflétera ce que vous êtes : quelqu’un qui ne consacre que peu à son travail artistique. Ce n’est pas bien grave, c’est juste dommage.
La vraie question à laquelle répondre est donc la suivante : dans le chaos de vos vies et de la photographie qui en découle quelle est la part d’intention que vous voulez mettre ? Je vous laisse y réfléchir et en tirer vos propres conclusions.
A priori ou a posteriori ?
Il n’y a que deux façons de construire un projet photographique : le faire a priori, ou a posteriori. Comme nous allons le voir, cela dépend de la nature de votre projet, mais est aussi lié, sans surprise aucune, à votre propre façon d’être, sans jamais que l’un ou l’autre des approches soit « préférable » ou « meilleure ».
Dans le premier cas, il s’agit de réfléchir à toutes les questions posées ci-dessus (quel sera mon sujet ? quel sera mon angle ? quelle technique vais-je employer ?), puis de noter le tout sur une belle feuille de papier A4. Pliez-là, gardez là dans votre poche, et suiviez ces instructions jusqu’à ce que votre projet soit mené à terme. Je grossis énormément le trait, mais l’idée principale est là : vous décidez de tout, puis vous appliquez le résultat de cette réflexion, à quelques ajustements près en cours de route. Il y a des branches de la photographie qui se prêtent très bien à cela, et où c’est même nécessaire, le photojournalisme en étant l’exemple le plus illustre.
Par exemple, Walker Evans a travaillé pour la FSA (grossièrement, le ministère de l’agriculture américain) afin de documenter la crise alimentaire des années 30, dans les région rurales des Etats-Unis. Et tout était prévu d’avance, l’administration lui fournissait un petit script des photographies qu’il devait ramener (cérémonie à l’Eglise, marché, photographies de paysans, etc.). Cela ne retire rien au talent d’Evans, il pouvait d’ailleurs s’en détacher à loisir, simplement, il partait avec une idée précise de ce qu’il devait ramener.
A l’inverse, vous pouvez travailler a posteriori, il s’agit de photographier très librement ce qui vous plaît, sans idée particulière au départ, puis de regarder ce qui revient souvent, marche ensemble, et de l’accentuer. Alors, ne vous méprenez pas, vous n’allez pas trouver dans vos archives des séries photographiques toutes prêtes, qui ne manqueraient plus que d’être éditées pour changer le monde. D’ailleurs, le nom est un peu trompeur, j’aurais dû appeler cela « a-posteriori-à-la-mi-temps », mais honnêtement, je trouvais ça laid. Car souvent, il s’agira de trouver, comme je le disais, ce qui revient souvent, marche bien ensemble, puis de continuer dans ce sens. A cette étape de votre projet, le travail reste encore à faire, cependant vous décidez de la direction bien après le top départ. C’est quelque chose qui se pratique beaucoup dans la photographie de rue par exemple, où l’on erre beaucoup, où l’on accumule de la matière avant de donner une direction à cette matière.
C’est par exemple comme cela qu’a fonctionné Eamonn Doyle, il a photographié les rues adjacentes à celle où il vit pendant près de 20 ans. Puis a rassemblé ces images, ce qui a formé une exposition qui est notamment passée aux Rencontres d’Arles, et partout en Europe. On doute aisément qu’il ne s’est pas levé un matin en disant « Tiens, je vais photographier les personnes âgées, et dans 20 ans j’en fais une série !« , c’est en toute logique, quelque chose qui est venu au fur et à mesure.
Ainsi, la question à 100 000 pesetas est la suivante : devriez-vous tout prévoir et formaliser votre projet avant de toucher au déclencheur, ou est-ce mieux de faire l’inverse ?
La bonne nouvelle, c’est que vous n’avez pas vraiment à choisir, car cela est strictement lié à votre façon de fonctionner. Même si vous pouvez alterner selon vos besoins, il me paraît difficile de vous restreindre à une seule approche, cela risquant en sus de vous brider inutilement. Personnellement, je fonctionne toujours a posteriori. Toutes mes tentatives de faire l’inverse se sont soldées par un échec cuisant, même quand sur le papier je trouvais l’idée géniale.
Et je vais même illustrer cela d’un exemple. L’image ci-dessous, Aquarium (Barcelone), fait partie de ma série L’image d’une ville, mais je comptais construire un projet autour d’elle. Cela devait s’appeler Le culte de l’Ombre, une série très graphique, orientée architecture/urbain, où le sujet n’aurait pas été la lumière, mais l’inverse, l’ombre, et comment elle cisèle les lieux de la ville. Je trouvais ça hyper intéressant, notamment parce que ça prend à contre-pied l’objet de la photographie : la lumière. Malgré le fait que tout soit bien prêt dans ma tête (le sujet, le traitement, comment le photographier) je n’ai pas réussi à sortir une seule autre image. Je n’y pense tout simplement pas, et je n’arrive pas à m’y contraindre.
A l’inverse, je me suis rendu compte que je photographiais sans cesse des Graffitis contenus dans des surfaces carrées/rectangulaires. Après avoir étudié ce que cela signifiait pour moi, ce qui me fascinait là dedans, j’ai continué, jusqu’à ce que ça donne la série éponyme. Les photographies la constituant forment des sortes de tableaux urbains que j’aime beaucoup.
Doit-il être personnel ?
C’est une question qu’il est légitime de se poser. Votre projet doit-il être strictement lié à vos goûts, ce que vous êtes, à votre vie, ou viser l’universalité via une certaine neutralité ?
Prenons un contre-exemple pour illustrer la réponse tranchée que je vais apporter à ce sujet : il existe une photographie parfaitement objective, qui fait fi de toutes considérations personnelles. Cette photographie est normée, validée par l’Etat, et toute personne en possède, que vous soyez sensibles ou non à la photographie vous en avez quelques-unes dans votre portefeuille. Vous savez ce que c’est ? Les photographies d’identité.
Voilà donc le summum, l’aboutissement total d’une photographie non personnelle. On comprend donc aisément pourquoi j’aurais plutôt tendance à vous inciter à aller dans le sens inverse. Car c’est bien la seule chose qui vous différenciera toujours de votre voisin : votre personnalité, votre histoire, ce qui fait que vous êtes ce que vous êtes. Ainsi, quand vous tombez sur quelque-chose qui vous touche personnellement (sans vous émouvoir aux larmes, hein ?), qui entre en résonance avec vos centres d’intérêt et autres, c’est que vous êtes sur la bonne piste.
Et pour que ça soit clair, par photographie personnelle, j’entends bien : qui vous ressemble, fait écho à ce que vous êtes, pour tout ou partie. C’est à différencier d’une photographie intime. ainsi, cela peut très bien aller de la photographie comme la pratique Nan Goldin, extrêmement centrée sur sa vie personnelle, à celle de Sebastião Salgado qui photographie les hommes avec le regard humaniste qui est le sien, en passant par Tom Wood, qui photographie simplement le Liverpool qu’il voit tous les jours sur son trajet quotidien. Une photographie personnelle ne consiste donc pas à raconter sa vie, ça n’a rien à voir.
Que dit l’horloge ?
Tic-tac, tic-tac, votre projet photographique doit-il avoir un cadre temporel pour fonctionner ? Autrement dit, doit-on s’imposer une date de démarrage et une date de fin ?
A vrai dire, comme la technique sert le projet, l’horloge doit faire de même. Le seul cadre qui est donc pertinent est celui qui servira le mieux votre propos. Par exemple, si vous photographiez la société durant le temps de la présidentielle (manifestation, débats, vote, réactions aux résultats), vous n’allez pas le faire sur 10 ans. A l’inverse, si vous vous intéressez en profondeur à un pays, par exemple la Chine comme l’a fait Patrick Zachmann, votre projet peut s’étaler sur des décennies et évoluer sur toute cette période.
Prenons deux exemples de photographes qui ont géré de façon complètement différente leur rapport au temps : William Eggleston et Paolo Woods & Gabriele Galimberti. Le premier a photographié la ville de Memphis toute sa vie, construisant la photographie du banal qui le caractérise, quand les seconds ont photographié leur sujet durant 3 ans. Durée qui leur a permis d’en faire le tour et de dire ce qu’ils avaient à dire.
Connaître sa marge de manœuvre
Il convient aussi de définir quelles sont les marges de manœuvre dont vous disposez pour réaliser votre projet, cela étant presque plus important que ce qui précède, étant donné qu’on n’en parle absolument jamais. Cela sera l’objet de cette partie, ces limites étant de 3 natures différentes :
- Celles propres à la photographie (ce que j’appelle « la limitation des arts »)
- Celles induites par votre motivation et votre investissement dans le projet (« Les chemins d’Icare »)
- Celles que vous devez imposer à votre projet (« Le château fort »).
Ces limites sont soit à connaître, soit à poser vous-même. Comme pour tout ce qui est évoqué dans cet article, l’important n’est pas ce que vous choisissez, mais de choisir et surtout de savoir qu’il existe un choix à faire.
Du champ expressif ou de la limitation dans les arts
Toutes les disciplines composant la photographie ne sont pas égales quant à ce que vous pouvez leur faire dire ; ce n’est pas pour autant qu’il y en a des mieux ou des moins bien, elles n’offrent juste pas les mêmes possibilités. Pour le dire clairement, la photographie est limitée. Vous ne pouvez pas tout dire avec tous les styles, tous les champs de la photographie n’offrent pas les mêmes possibilités d’expression, même si ça peut paraître évident, il faut se poser la question à un moment, au regard de ce que vous voulez mettre dans votre photographie.
Pour reprendre l’analogie de l’introduction avec les voitures : le terrain importe aussi dans le choix du véhicule que vous allez fabriquer (et réciproquement). Tous les terrains ne permettent pas de circuler avec toutes les voitures (pas de Ferrari pour faire du trail, ni de SUV dans les petites rues de Veules-les-Roses).
Cela est forcément fonction de votre sujet, et aussi de l’angle d’approche / traitement que vous allez y apporter. Par exemple, si vous décidez de travailler sur la condition des femmes dans les banlieues, la photographie de paysage n’est peut-être pas le champ photographique le plus apte à exprimer ce que vous voulez y mettre. Bien sûr, les frontières sont floues, et on peut se jouer de ces limites, Txema Salvans le fait très bien dans le travail que j’ai présenté ci-dessus. Mais c’est un point à connaître, pour ne pas se sentir inutilement frustré (et donc laisser mourir son projet) si vous ne trouvez pas d’adéquation entre les champs qui de prime à bord vous bottent, et les projets sur lesquels vous avez prévu de travailler. Si votre dada c’est l’astrophotographie, mais que vous voulez bosser sur la condition humaine, je ne vous cache pas que ça va être relativement tendu.
Il y a donc une forme d’adéquation à trouver, une mise en musique générale, entre les styles qui vous parlent, les possibilités qu’ils offrent et les sujets que vous voulez travailler. Alors, je conçois que ça peut paraître un brin évident, mais bon, il y a des portes qu’il vaut mieux enfoncer, plutôt que d’oublier qu’elles existent.
Personnellement, j’ai toujours préféré les branches très « ouvertes » de la photographie, celles où l’on peut dire beaucoup et qui laissent respirer la personnalité de l’auteur, comme la photographie de rue (qui permet d’aborder plein de questions, tant personnelles que sociétales je trouve). A l’inverse, les disciplines plus techniques (comme la macrophotographie) ne m’ont jamais vraiment intéressé, du moins ne me laissent pas la place de dire ce que j’aurais à dire.
Les chemins d’Icare
Pour cet article, je ne convoquerai pas de philosophes allemands pour présenter ce concept, car à la rédaction j’étais plutôt d’humeur « mythologie grecque ». Ce qu’il y a de bien avec la mythologie grecque, en dehors de son originalité et de sa diversité, c’est qu’elle a pratiquement traité tous les sujets universels et les questions humaines. Il y a aussi suffisamment d’histoires pour illustrer à peu près n’importe quoi, la preuve en étant la mention d’Icare aujourd’hui.
Le mythe d’Icare commence par l’histoire de son père, Dédale, le célèbre ingénieur, le Steve Jobs de l’époque. Pour gagner sa croûte, il bossait pour le roi de Crète, Minos. Un petit job d’ingénieur plutôt bien rémunéré et avec une mutuelle de qualité et un plan retraite assuré. Cela commence à partir en cacahuète à cause de la femme de Minos, la reine Pasiphaé. Cette dernière tombe amoureuse d’un taureau blanc offert par le dieu Poséidon (oui, c’était tendance comme cadeau à l’époque) ; amoureuse, Pasiphaé demande à Dédale de lui fabriquer un artifice lui permettant de s’accoupler à un animal sacré, ce qu’il accepte de faire. De cette naissance naîtra le Minotaure. Bon, je l’accorde, cela peut paraître un peu étrange, mais je rappelle que l’on vit à une époque où 1/7e de l’humanité vénère un gars qui marchait sur l’eau, qui pouvait aussi la changer en vin, donc ne faites pas les malins.
Dédale sent que le vent va tourner et qu’il a peut-être fait une bourde, du coup il crée le labyrinthe pour y enfermer le Minotaure, ni vu ni connu. Il file aussi à Ariane un tuto pour que Thésée puisse aller descendre ladite créature : garder un fil noué à sa cheville pour retrouver son chemin au retour, parce que sinon, il y serait resté coincé, et ce n’est pas pratique. Le fil d’Ariane ça vient de là d’ailleurs, et ça aurait dû s’appeler « le fil d’Ariane conseillé par Dédale », voilà.
Cependant Minos n’est pas dupe, et un peu agacé par les trahisons répétées de Dédale, il décide de le jeter, avec son fils Icare (qui jusque-là n’avait rien demandé à personne) dans le labyrinthe qu’il avait créé. Et Dédale se retrouve bien coincé, Minos contrôlant les mers et les terres alentours, empêchant toute sortie en douce.
Mais Dédale a plus d’un tour dans son sac, il utilise toutes ses capacités d’ingénieur pour créer l’équivalent du Ryan air de son époque : des ailes d’oiseau, confectionnées avec de la cire et des plumes. Il les confie à Icare pour qu’il puisse s’échapper, tout en le mettant en garde : il ne doit pas s’approcher trop près de la mer, à cause de l’humidité, ni trop près du soleil à cause de la chaleur. Icare lui répond « Oui, oui, d’accord« , un peu blasé de la galère dans laquelle il se retrouve à cause de son paternel, et décolle. Cependant, lors de son vol, grisé par le plaisir de voler, il oublie les interdiction, grimpe toujours plus haut, jusqu’à ce que la chaleur du soleil fasse fondre la cire tenant ses ailes qui l’abandonnent. Il chutera jusqu’à la mer et sa mort, qui porte désormais son nom : la mer Icarienne.
Pourquoi est-ce que je vous parle de ce mythe et quel est le rapport avec la construction de vos projets photographiques ? Voyons ce que nous pouvons retenir de cette histoire :
- Ne faites jamais confiance aux ingénieurs, ce n’est pas parce qu’ils peuvent faire quelque chose qu’ils doivent le faire (ex : la bombe atomique).
- L’idée de Pasiphaé est bancale, il est inutile de forcer à aller ensemble des choses qui n’ont pas été prévues dans ce but, et ça attire des ennuis à tout le monde (ex : les soutiens d’Emmanuel Macron).
Plus sérieusement, ce qu’il faut retenir de ce mythe, pour ce qui nous intéresse, c’est sa toute fin. Le reste n’étant présent que pour lui donner du contexte et un peu de sens. Les chemins d’Icare, c’est tous ceux qu’il aurait dû prendre, pour réussir à atteindre la terre. C’est l’ensemble des possibilités, limitées par le soleil et la mer, ceux-ci représentant l’échec et la mort. Et quand vous aurez lancé votre projet photographique, vous aussi vous aurez à rester sur les chemins d’Icare. Vous serez sans cesse entre deux options, vous laisser griser tel Icare, en faire trop, dans tous les sens, au risque que votre projet perde son propos et de vous brûler les ailes. Ou à l’inverse, ne pas y mettre assez d’énergie, de conviction et de motivation, et de petit à petit sombrer vers l’océan.
Le cadre photographique, ou le château fort
Ce n’est pas pour rien que la partie sur le cadre photographique arrive à la fin de cet article. En effet, en réfléchissant à tout ce que j’ai évoqué, et en le définissant pour vos projets, vous allez construire ce que l’on peut appeler un « cadre photographique ».
Une métaphore que j’aime beaucoup pour expliquer ce que cela représente est celle du château fort. Considérez chaque décision que vous avez prise et arrêtée pour votre projet comme une pierre de ce château. Plus vous allez y travailler, plus vous allez vous creuser les méninges, plus le château va être costaud, avec des fondations bien profondes et donc solides. Les photographies que vous allez décider de conserver pour votre projet, lors de l’édition de vos images, seront donc incluses dans ce château fort/cadre photographique.
Cependant, vous vous doutez bien qu’il n’est pas utile de construire un tel monument pour y déverser tout et n’importe quoi. Votre château a autant d’intérêt que ce qu’il contient, par conséquent, il vaut mieux éviter d’y mettre tout et n’importe quoi, sinon vous prenez le risque de casser votre cadre photographique (donc le château lui-même, got it ?). C’est comme si des brigands de bas étage prenaient le pouvoir sur votre édifice, c’est absolument ce que vous voulez éviter. Donc pour que votre château, ça ne soit pas la cour des miracles, il vaut mieux être très vigilant à ce qui y entre, et beaucoup plus laxiste sur ce qui en sort (ce qui est dehors par définition ne peut vous être dommageable).
Ainsi, pour être tout à fait pratique, pour gérer mes projets, j’utilise une sorte de sas. Cela peut-être une collection Lightroom, un dossier dans l’explorateur de fichiers de votre ordinateur, une boite contenant des négatifs, c’est comme vous voulez. Le sas contient ce qui pourrait rentrer, mais n’a pas encore subi l’examen approfondi du temps et du recul qu’il offre. Les images entrent et sortent du sas jusqu’à ce que le tout forme un lot cohérent et duquel je suis sûr. Une fois que c’est le cas, je le publie, comme un projet ou comme nouveau lot d’un projet pré-existant.
L’explication par l’exemple
Pour terminer l’article je trouvais ça intéressant de vous faire un petit retour d’expérience sur un projet que j’ai mené récemment, Intercité, sur les erreurs que j’ai pu commettre et les enseignements que j’en ai tirés. Alors, ça ne veut pas dire que vous ne ferez pas d’erreurs vous-même grâce à ces conseils, simplement espérons que les vôtres seront meilleures, ou auront plus de panache.
J’ai commencé ce projet par le traitement, et non par le sujet en soi. En fait, aimant particulièrement la photographie de rue, j’ai décidé de m’y mettre. En soi, c’est une initiative tout ce qu’il y a de plus louable, mais la photographie de rue est une discipline assez éculée, très populaire, et clairement elle ne se tient pas d’elle-même. J’entends par là que c’est une discipline trop vaste, où l’on peut faire trop de choses, pour qu’une série d’images soit cohérente et intéressante juste « parce que c’est de la photographie de rue ». Donc, à l’origine, la série se composait d’une somme des images que j’avais accumulées, sans véritable fil conducteur. C’est ma première vraie erreur, ne pas avoir pensé au sujet avant de commencer.
La deuxième est que je n’ai pas été assez critique avec moi-même. J’ai laissé passer des choses qui m’auraient sauté aux yeux chez quelqu’un d’autre. Pour reprendre l’idée développée ci-dessus, je me suis perdu sur les chemins d’Icare et j’ai glissé vers la mer. Par exemple, l’image ci-dessous, qui avait un côté gaguesque n’a plus du tout sa place dans le projet tel que je l’envisage maintenant, même si elle a sa place dans le cadre contextuel du projet (elle a été prise lors de mon Rouen-Paris-Rouen hebdomadaire), je l’ai donc retirée.
L’erreur est donc d’avoir cru que je pouvais y arriver tout seul. Passé un certain moment, avoir un avis extérieur, celui d’une personne dont vous jugez l’avis digne de confiance, me paraît essentiel pour franchir certains cap.
Je suis aussi beaucoup plus restrictif maintenant, ayant tiré les leçons de ces erreurs. Il me faut beaucoup de temps pour incorporer une photographie au projet, même si elle me plaît beaucoup. Souvent, quand je photographie, je me dis que dans le doute, il vaut mieux déclencher et juger de l’utilité de l’image après, et c’est tout l’inverse lors de la sélection : dans le doute, il vaut mieux mettre ça à la poubelle ou dans un coin, quitte à revenir dessus plus tard, plutôt que d’incorporer au projet des choses dont je ne suis pas certain. Par exemple, j’adore l’image ci-dessous, elle correspond tout à fait à l’esthétique que je veux développer. Par contre, elle a été prise au Luxembourg, ce qui n’a rien à voir avec le projet Intercité. Du coup, elle restera dans le placard en attendant de trouver sa place ailleurs. Mon lot de consolation étant de pouvoir l’incorporer au présent article.
[Disclaimer] Entre la rédaction de l'article et sa publication, j'ai eu un problème sur une sauvegarde, ce qui fait que l'image a été perdue, c'est dommage mais je m'en remettrai. Au lieu de vous mettre une autre image en douce, ou de supprimer le paragraphe, je vais vous la décrire, pour la postérité. La photographie représente un homme âgé qui dîne avec un ami plus jeune dans un restaurant. Elle est prise de l'extérieur, les lumières de la ville se reflètent sur la vitre et forment une une sorte de halo au dessus des deux hommes. Ils sont sur des fauteuils en cuir, et l'homme plus jeune montre un document à celui en face de lui. Un miroir est présent derrière l'homme âgé, on y voit le reflet du visage d'un troisième homme assis à une table voisine. Votre imagination fera le reste.
Au final, ces balbutiements au début du projet (parce qu’au final il ne s’agit que de ça, rien de bien dramatique) m’ont aidé à mieux le définir. De temps en temps on doit échouer je pense, pour mieux reconstruire nos travaux, et c’est ce que ça m’a permis de faire. Désormais, j’ai un vrai plaisir à travailler ce projet, je sais ce que je cherche, je fais ce que j’aime et j’aime ce que je fais, et le tout avance beaucoup mieux. Le sas est plein d’images, et une fois que ça aura bien mariné, je serai sûr de moi à la publication (qui devrait arriver dans quelques semaines). Enfin, en ayant un cadre bien défini, un trio projet / traitement & angle d’approche / technique clair, et en ayant conscience des limites qui existent et que j’ai à m’imposer, j’éprouve beaucoup moins de frustrations à tenir ce projet. Savoir où on va, c’est déjà aller quelque part un peu, non ?
Conclusion
Que retenir de tout ça ?
Simplement que vous n’avez plus d’excuses, vous avez toutes les clés en main pour vous y mettre, pour construire un projet photographique. Je l’avais dit dans l’article sur la photographie de rue, il est plus facile de se souvenir que de réfléchir, il est plus aisé de sentir les géants qui nous portent que de lever les yeux au ciel et de voir la place qu’ils nous laissent. Vous n’êtes pas membre d’une grande agence photographique ? Araki non plus. Vous n’avez pas fait une grande école d’art ? Vivian Maier non plus. Vous n’avez pas été exposé dans un grand musée ? Francesca Woodmann non plus. Vous n’avez pas les occasions d’un Robert Capa partant à la guerre ? Avant de mourir pour sa photographie, il a commencé par se lever de sa chaise.
On est tous fichus pareil, deux bras, deux jambes, un cerveau entre les oreilles, et une boite à images dans un coin. Et c’est suffisant pour faire de la photographie. La photographie, elle, elle en est est au même point qu’il y a 150 ans, et n’a besoin que d’une chose : des travaux qui comptent. Et qui comptent pour vous avant tout. L’histoire ne se souviendra pas des likes, des partages, ou de toutes ces futilités, elle ne garde que ce qui compte, le temps effacera le reste.
Pour le dire en américain d’Amérique : Just get the job done.
Prenez soin de vous et à bientôt.
Ps3 : Si le sujet vous intéresse, j'ai écrit un livre complet sur la création de projet . Il vous apprendra comment développer une photographie personnelle, rester motivé, et trouver votre style grâce à un projet photographique. Découvrez-le ici : Vers la lumière.
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