J’ai toujours vu ce Blog comme étant un support très personnel ce que j’ai dit quasiment dès les débuts. Alors certes, j’y partage des découvertes, des concepts, des réflexions, avec pour but d’éveiller à certains aspects de la photographie, d’en vulgariser d’autres, mais ça reste toujours un contenu très personnel et subjectif. Même s’il est argumenté.
Le contenu n’est pas neutre, ne le sera jamais et c’est très bien comme ça. Vous n’êtes pas en train de lire du recyclage de pages Wikipédia. Et je pense que chacun de notre côté de l’écran, ça nous évite de nous emmerder. Personne ne s’en plaindra.
C’est quelque chose qui n’est pas forcément visible quand je parle de bouquins, de pratique en général ou de technologie, par exemple. Mais ça le sera aujourd’hui. Je vais vous présenter un ressenti que j’ai depuis quelques mois. Je vais essayer de le coller à des éléments plus subjectifs pour essayer de le rendre plus concret, plus palpable. Si je le fais, c’est aussi parce que j’ai bon espoir que vous vous y retrouviez un peu et que l’échange, aussi asynchrone soit-il, vous éclaire un peu aussi si vous êtes dans la même situation.
Ce ressenti est super simple et le titre du présent article en aura trahi la révélation : en photographie, j’ai l’impression qu’on s’emmerde un peu.
J’ai le sentiment de voir en permanence les mêmes contenus en boucle. Les Youtubeurs de tests de matos et de logiciels testent les mêmes trucs sans arrêt. On s’ennuie. Les Youtubeurs argentique nous font cette espèce de croisière de l’insipide, où après nous avoir expliqué 3 fois « Quelle pellicule choisir pour X », ils testent tous les 35mm, puis tous les moyens formats, puis passent à la chambre. Je ne sais pas si la niche va mourir quand ils seront tous arrivés à la chambre 20×25″ ou quand le prix de la Portra aura atteint les 25 € / bobine. La course est lancée, faites vos paris.
De toute façon, ça fait assez longtemps que j’ai diminué ma lecture des sites web et des vidéos YouTube consacrés à la photo. Je préfère les sources de première main. Je préfère lire un bouquin que d’écouter quelqu’un m’en parler (ce n’est pas pour autant que je trouve que c’est mal de le faire, vu que je le fais tout le temps. Mais ça n’est pas mon mode de consommation).
PS : Mis à part Paul Napo, parce qu'il me fait marrer. Et, oui, je regarde peu le contenu de Laurent, mais c'est parce qu'on discute H24. Donc généralement on a déjà échangé sur le contenu des vidéos une éternité avant qu'il ne paraisse.
Je ne lis plus non plus de magazines, mes livres en retard me jetaient des regards accusateurs quand je tentais. J’étais abonné à Polka et Fisheye fut un temps. Mais j’ai fini par arrêter. Faute de temps pour les lire, et aussi à cause de la ligne trop politicienne du premier et de la pression du deuxième. Dans Fisheye, on voit des choses chouettes tous les 2 mois, mais j’en gardais souvent l’impression de ne pas avancer assez vite. Que tout le monde faisait plein de trucs chouettes et que quoi que j’entreprenne, j’étais toujours un peu à la traîne derrière 1 000 projets teintés d’un entre-soi très parisien.
Si cette morosité est sans doute en partie de ma faute (on y reviendra dans quelques paragraphes, soyez patients), je pense que le contexte joue pas mal aussi. Discutons-en un peu.
Une photographie au ralenti ?
Je viens de vous décrire une impression de lenteur et d’inanimation que je perçois. Mais je pense qu’elle a aussi des raisons objectives d’être là.
Où est passée la moula ?
La première et la plus évidente de toute, c’est la baisse de la vente d’appareils photo, tout simplement. J’en avais parlé rapidement dans l’article sur l’IA, mais je ne suis pas le seul à avoir perçu le problème. Chris Som en a aussi parlé dans une vidéo l’année dernière.
Je vous remets le graphique, ça ressemble à ça :
Bon, il n’y a pas besoin de chercher midi à quatorze heures pour le comprendre : depuis l’arrivée des smartphones, les ventes ne font que s’effondrer. Alors non, Candy Crush n’a pas tué la photographie, les gens ayant préféré un loisir à l’autre. C’est plus les caméras qui sont devenues de plus en plus qualitatives. La plupart des gens achetant des appareils photo pour enregistrer des souvenirs (familiaux, de vacances), ce besoin à disparu.
Vous pourriez vous dire qu’on s’en fout. Que ce ne sont pas les gens qui achètent des reflex d’entrée de gamme en tête de gondole à la Fnac qui font les livres photo qui peuplent nos bibliothèques. Les expositions auxquelles on va. Que c’est complètement décorrélé. Sauf que… non.
J’ai (re)commencé en achetant un appareil en tête de gondole à la Fnac. Puis j’ai été lire apprendre.photo. Et des livres, plein de livres. Vous connaissez la suite.
Beaucoup de gens démarrent la photographie pour enregistrer des souvenirs, y prennent goût, persévèrent puis font des trucs intéressants ensuite.
Et ce flux est en train de ce tarir.
Tout d’abord, il y a 2 conséquences à ça :
- Le marché se réduisant, les prix augmentent. Il est de moins en moins possible de faire des économies d’échelles et donc l’accès au matériel est de plus en plus difficile. Un Canon EOS 5D Mark III était vendu à sa sortie, en 2012, 3 190 €, soit 3 623,85 € de 2023 si on corrige l’inflation. Là où un EOS R5 sortait à 3 900 € il y a 3 ans lors de sa sortie. Je n’ose imaginer le prix, avec l’inflation actuelle, s’il sortait maintenant. Ajoutez à ça le COVID-19 et les difficultés d’approvisionnement qui ont retardé la sortie de nombreux appareils pour renouveler l’offre et attirer de nouveaux consommateurs (qui veut mettre 4 000 € dans un appareil qui a 3 ans ?) et ça ne va pas aller en s’arrangeant.
- L’écosystème est globalement moins dynamique. Moins de gens s’intéressant à la photographie, c’est :
- Moins de créateurs de contenus qui renouvellent l’intérêt et la vision que l’on peut avoir de la photographie,
- Moins d’avis différents, donc aussi moins de polémiques, d’échanges, de réflexion (parce que l’air de rien, dans l’altérité on apprend aussi beaucoup de notre vision des choses),
- Moins d’audience pour les contenus, ce qui n’est pas sans impact. Vous sous-estimez sans doute l’influence que vous avez sur les créateurs de contenus. Les échanges, les questions, les mails et tout le tintouin sont pour beaucoup dans le contenu que je produis. C’est stimulant, ça amène à réfléchir, voir les choses autrement et ainsi de suite. On perd aussi cette fraîcheur avec un écosystème plus mou.
Sachant que ce constat s’inscrit dans une période de forte inflation (+ 5,2 % en France en 2022), ça n’est pas la fête. Les loisirs étant le premier domaine sur lequel on coupe les dépenses dans ce genre de situation.
Les robots vont nous remplacer
Bon, le sous-titre est très exagéré. Mais comme j’en ai parlé dans l’article sur les IA, pas mal de professions vont être bouleversées par l’arrivée de l’intelligence artificielle dans la photographie. Je ne vais pas vous refaire l’article, il est ici, vous pouvez le lire :
Tout à l’heure on parlait de la photographie de souvenir comme porte d’entrée. L’envie de se lancer dans la photographie professionnelle en est une autre. Pas mal de gens achètent un appareil avec l’envie de démarrer des prestations par la suite. Ils développent un intérêt pour le sujet, s’informent, et viennent apporter un peu de pep à l’écosystème dont je parlais.
Sauf que vous n’êtes pas sans savoir qu’il s’agit d’un métier en tension. Les photographes ont du mal à être payés dans les temps par la presse. Et les différentes sources que j’ai pu trouver s’accordent à dire qu’un débutant gagne l’équivalent du SMIC. Sachant qu’en plus il doit acquérir un matériel coûteux pour se lancer.
Et dans ce domaine déjà en crise, l’IA va réduire les opportunités professionnelles (il serait fou de se lancer dans la photographie d’illustration maintenant ou de tout miser sur le packshot). À un loisir cher s’ajoute désormais un métier de plus en plus difficile. Morosité je vous disais.
Mort au hardware, vive le software
Il y a un point qui me donne un peu d’espoir sur ce sujet.
Le hardware, c’est le matériel physique. Votre appareil photo, ses circuits, moteurs, pièces optiques, boutons et tout le bordel. Le hardware c’est essentiel, mais ça reste limité par nos capacités de production et le monde réel. Un jour on fabriquera le meilleur appareil photo du monde et on ne pourra plus l’améliorer. J’exagère un poil, mais vous voyez l’idée : on ne fera pas des appareils photo compacts qui tiennent dans la poche avec un capteur de moyen format à 100 millions de pixels, une rafale de 100 images par seconde et qui peuvent monter à 4 millions d’ISO sans bruit. Pour les appareils photo, cette limite est encore loin, en revanche pour les smartphones on est plus ou moins en train de l’atteindre. Tout simplement parce qu’ils ont une limite en termes de taille et de poids que l’utilisateur est prêt à accepter. C’est une contrainte forte et donc ils n’auront jamais de capteurs plein format, ni d’optique 100-600mm.
Le software, c’est le code qui opère tout ce joyeux bazar. Quand vous appuyez sur le déclencheur, l’appareil enregistre l’image, la traite, écrit des fichiers sur votre carte SD. Vous avez des menus, des paramètres et tutti quanti. Ça, c’est le software et la limite est beaucoup plus loin, la marge de progression est plus importante et surtout : elle est rétroactive.
C’est là que la magie opère. On peut garder le même capteur et améliorer sans cesse le software qui traite tout ça pour en tirer des images toujours meilleures. C’est par exemple ce qu’a vite compris Google avec ses smartphones Pixel, qui misent tout sur le traitement des images (et non sur la débauche de nombre de capteurs), et pour en avoir possédé un : ça marche extrêmement bien.
Si vous avez besoin d’être convaincus, vous pouvez aller voir ces quelques exemples que j’ai publiés sur Twitter de photographies dont le bruit numérique a été corrigé grâce au nouveau moteur de traitement, basé sur l’IA, de Lightroom.
J’ai vu d’autres tests faits avec des appareils de plus de 10 ans et le constat est sans appel : la barrière de la montée en ISO est en train de tomber. Il n’y aura bientôt plus besoin de changer d’appareil pour « avoir une meilleure montée en ISO ». Le traitement numérique se chargera largement de le corriger et ramènera tous les appareils sur un quasi (ne rêvons pas trop) pied d’égalité. La puissance du software c’est ça : une mise à jour et des photographies prises il y a 10 ans sont désormais parfaitement exploitables.
Alors vous me direz : en quoi est-ce que les améliorations du software vont résoudre les soucis que j’ai décrits ?
Eh bien, j’ai bon espoir que dans les années qui viennent, l’accès à la photographie soit désormais possible avec l’appareil que tout le monde a dans la poche.
Comme je vous le disais, avant on achetait son appareil pour une pratique familiale, puis on s’intéressait au sujet et on montait en gamme / progressait petit à petit. Mais si dans quelques années les smartphones sont capables de rivaliser avec des boîtiers plus haut de gamme (grâce au traitement), de permettre de faire des tirages de qualité, des livres, des zines, des expositions, sans que l’on puisse voir la différence, je me dis que beaucoup se laisseront peut-être tenter par une pratique plus sérieuse.
Le jour où le software dans votre smartphone sera capable d’imiter le rendu d’une optique Leica à 5 000 €, sans que personne ne puisse le remarquer… les puristes vont sans doute râler, mais beaucoup de gens vont sans doute sans doute se mettre à la photographie.
Alors oui, ça ne règlera pas du tout les soucis de la photographie professionnelle que j’ai évoqués. Mais l’excuse de « j’aime bien la photo, mais je ne peux pas en faire je n’ai qu’un smartphone et pas les moyens d’acheter un appareil photo » n’existera plus.
La limite qu’est le hardware disparaît et il ne reste que la création d’image pure.
Laissez-moi rêver et croiser les doigts. 🤞🏻
Un photographe au ralenti ?
Comme je le disais au début de l’article, je pense avoir une part de responsabilité dans la perception que j’ai de la photographie actuellement. J’ai bien réfléchi avec mes petits neurones et une tisane citron-gingembre (j’déconne pas, c’est la meilleure) et j’observe 3 points de blocage.
Et comme vous avez peut-être les mêmes chez vous, on va en faire le tour.
L’impact de la culture
Dans un article d’il y a quelques années, j’ai défendu le fait que la culture photographique n’avait pas un impact négatif sur votre pratique (en opposition au fameux « Nan mais je ne me cultive pas, je ne veux pas être influencé, je fais les choses dans mon coin », qui amène souvent les gens à faire des photographies de paysage moyennes et éculées dans le Jura). C’est par ici si vous ne l’avez pas lu :
Je suis toujours convaincu de la nécessité de la culture photo dans la pratique et ma position n’a pas bougé d’un iota à ce sujet.
Cependant, il y a un effet de bord auquel je n’avais pas pensé : je suis beaucoup plus difficile à surprendre. Et donc, cela contribue au sentiment que j’ai décrit, une impression d’ennui et de voir toujours la même chose.
Je pense que c’est simplement mathématique.
Au tout début, quand j’ai commencé à m’intéresser au sujet, mon premier coup de cœur en photographie (sans doute August Sander) représentait 100 % des photographes que j’aimais à lui seul. J’avais le temps de creuser son œuvre, son parcours et beaucoup de place dans ma tête pour stocker tout ça. Vous voyez la logique : plus il y en a, plus un nouvel ajout devient marginal.
J’ai une base d’autorités Notion où je rassemble tous les photographes pour lesquels j’ai des livres, enregistré des articles et ainsi de suite (j’explique ça là si ça vous intéresse). Maintenant, il y en a 573. Bien évidemment je suis totalement incapable de vous parler de tous ceux-là. Je dois très bien en connaître 10 %, vaguement 50 % et avoir une simple idée du reste. Simplement, une nouvelle découverte ne représente plus que 0.17 % du tout. La place dans ma tête n’est pas illimitée.
D’ailleurs, je pense que c’est aussi ce qui fait qu’instinctivement je parle souvent des mêmes photographes si je n’y prête pas attention : c’est ceux que j’ai découverts au début, que j’ai pu bien creuser, qui m’ont marqué, et du coup je suis à l’aise pour en parler. Mais au final, je ne pense pas que ça soit du tout une question de qualité. Je vous ai bassinés avec certains photographes (je ne les citerai pas ici, mais vous pouvez jouer aux devinettes en commentaires), mais au final ils n’ont pas forcément produit des travaux meilleurs que ceux de mes découvertes récentes. C’est juste que le choc de la découverte, l’émerveillement, l’envie de savoir plus se sont faits autour de leurs noms.
Et c’est difficile de reproduire ça, d’être marqué de la même façon par le 50e photographe que l’on découvre et qui fait de la photographie en noir et blanc, très granuleuse, influencée par Provoke.
Des maths je vous disais.
Mais je pense sincèrement que si j’avais découvert Géraldine Lay (dont je parle dans la vidéo ci-dessous) avant un célèbre photographe de Memphis, j’aurais été un fan hardcore de son travail. Et l’autre m’aurait semblé être une version un peu passée d’une photographie dans la même veine.
Dois-je devenir un Sisyphe heureux ?
Avec la production de contenus, ma pratique de la photographie a toujours eu 2 aspects :
- Un aspect cyclique : ce sont les articles et les vidéos YouTube, que j’essaie de sortir à un rythme régulier (surtout pour les deuxièmes, je sais 😅),
- Un aspect « projets de long terme » : les formations, le zine, le livre, l’exposition, etc.
Ces dernières années, j’ai cumulé les 2 et ça a été assez intense. Les 20 heures de formation m’ont quasiment pris 2 ans et demi à sortir, ça a été pas mal de boulot. J’ai adoré les faire, tout comme j’ai adoré faire le livre, le zine et le reste. C’était la première fois que je me lançais là-dedans et c’était super intéressant, enrichissant. Grâce à tous ces projets j’ai pu progresser sur plein d’aspects de ma pratique, donc je ne regrette pas du tout.
Par contre, je n’ai pas du tout envie de me relancer dedans tout de suite. J’ai envie de me laisser un peu de temps, de revenir à une pratique photo déconnectée de tout enjeu. Avancer un projet photo pour le plaisir de produire un corpus d’images qui me plaît. Que ça mène quelque part ensuite ou pas, mais je ne me fixe pas tellement d’objectifs pour l’année qui vient.
PS² : Notez que chacun de mes projets de diffusion (livre, zine, expo) s'est toujours décidé a posteriori. Après que le projet a été terminé, ou presque. Je n'ai jamais rien fait "dans le but de X" ensuite. D'une certaine façon je continue dans cette voie, pour le moment je ne cherche pas activement à diffuser ce que je fais/ferai.
Donc je suis à un petit tournant dans ma pratique. Et d’une certaine façon, je me demande si je ne suis pas en train de confondre une période de calme avec une période de creux. Ces 2 dernières années et demie, j’ai été très actif, j’ai passé un nombre incalculable de soirées à bosser sur tous ces projets et là je reviens à la pratique que j’avais avant 2020. Un peu de travail sur la production cyclique de contenus et un projet photo à côté.
Peut-être que je dois devenir un Sisyphe heureux et apprendre à y trouver du plaisir. À profiter du calme. Tentons ça.
De la suite dans les images
Cette sous-partie sera l’occasion de faire d’une pierre deux coups.
Parce que je vous ai dit qu’en réfléchissant un peu j’identifiais 3 points de blocage (et on en est au 3e, suivez) et aussi parce que Paul Napo m’a dit que je ne parlais pas assez de mes travaux en cours. J’en parle quand c’est terminé, mais jamais pendant. Sans doute parce que j’aime bosser seul, la porte fermée, mais on va faire une légère entorse. J’avais dû commencer à évoquer Noctabilia (sans trop détailler le projet) environ un an avant la publication, personne n’est mort, je devrais survivre cette fois-ci aussi.
Je suis face à un problème que je n’ai jamais eu.
Mais pour que vous compreniez lequel, je vais vous donner un peu de contexte. J’ai toujours dit que l’on pouvait trouver le sujet d’un projet de deux façons : soit a priori (on a une idée, on la traite par la photographie) soit a posteriori (on a les images, on trouve ce qui les rassemble et on continue). Je vous décris ça de façon très rapide, j’ai fait un article entier sur le sujet, vous pouvez le lire si vous voulez creuser ces notions :
Pour mes projets, généralement, je suis plutôt dans l’équipe « a priori ». On va prendre un schéma, ça sera plus clair :
Habituellement, je trouve l’idée du sujet autour du point A.
- Pour InColors, c’est venu assez vite, ça a été plutôt simple à identifier,
- Pour NORLANDO, je suis parti aux USA avec l’idée de ramener pas mal d’images du road trip. Donc c’était déjà pas mal dégrossi,
- Et Noctabilia, j’ai su ce que c’était au bout de 2 sorties photo, je pense. Et à la 3e j’avais le titre en tête.
Dans chacun de ces cas, le défi consistait plus à faire l’édition, à décider de ce qui rentre (ou non) dans le projet. D’essayer, petit à petit, de définir des critères clairs pour constituer le corpus d’images final tout en respectant le sujet.
Pendant le confinement, j’ai commencé un projet photo. Ça fait donc un peu plus de 2 ans que je remplis une boîte numérique d’images. Et j’en suis au point B : j’ai une sélection assez avancée, plusieurs versions de l’édition (mais une qui a largement ma préférence), sauf que je ne sais toujours pas ce que c’est. C’est l’inverse : je sais parfaitement ce qui va dans le projet ou non. L’édition est limpide. Mais je ne suis pas capable de l’expliquer.
Je peux vous dire ce que contiennent les images, où elles ont été prises et pourquoi. J’ai pas mal de mots clés en tête, de thèmes qui me parlent pour l’expliquer, mais rien de figé. Et encore moins de titre. La dernière sélection que j’ai faite contient une trentaine d’images et je trouve qu’elles marchent plutôt bien ensemble. Je vous en mets 3 pour vous donner une idée de l’ambiance.
Et ça, le fait de peiner à saisir le sens, à finaliser cet aspect-là, m’emmerde assez. C’est un peu comme nager avec une anguille. Je sais que c’est là, pas loin. Je vois la forme globale du truc, je la sens passer. Mais je n’arrive pas à l’attraper pour la regarder de près.
J’avais identifié 3 raisons personnelles pour expliquer cette sensation d’ennui que je vous ai décrite, c’était donc la troisième.
Quelles solutions ?
J’ai vu quelques photographes autour de moi dans des situations similaires. Certains ont choisi de débrancher des réseaux sociaux et de bosser dans un coin, dans une petite bulle avec des proches. Même si je perçois l’utilité et que l’envie de ralentir m’intéresse, je ne pense pas que ce genre d’approche changerait grand-chose dans mon cas.
Je ne peux pas changer le contexte économique et technique, mais je peux changer quelques points dans ma pratique. Comme :
- Tenter plus de trucs que je n’ai jamais faits en photographie. Alors non, je ne vais pas me lancer dans la photographie de macro, mais je pensais plus à un truc tout simple comme shooter au trépied la journée. Cela oblige à ralentir, profiter du moment, prendre le temps de composer.
Je sais que c’est un rythme qui m’avait plu pour Noctabilia, ça ferait sens de réessayer. Quitte à utiliser des filtres ou autre pour vraiment aller au bout de la démarche (ce que je n’ai jamais fait, à part avec mon Canonet pour d’autres raisons). Je vois ça comme une façon de renouveler la pratique et, qui sait, de trouver le sens du projet sur lequel je suis en arrêtant de courir après ? - M’abonner à une revue. Alors oui, ça paraît très basico-basique comme ça, mais il y a une raison. Comme je vous le disais, j’ai l’impression de faire peu de découvertes, ou de simplement les empiler dans un coin au fond de ma tête sans trop y prêter attention. De collecter plus que de connaître, et j’ai envie d’inverser la tendance.
Je pense que c’est lié à ma façon de découvrir de nouveaux photographes, soit sur internet (ou tout est basé sur une logique de flux, une impermanence), soit directement en librairie. Dans le premier cas, on creuse rarement ce qu’on voit (je dois suivre 500+ photographes sur Instagram, et vraiment connaître le travail de 20), dans le deuxième cas, je suis tributaire de l’offre disponible au moment où je fais mon petit tour. Il y a sans doute plein de livres super dont je n’entendrai jamais parler en n’habitant pas à côté d’une librairie spécialisée. Cela me semble donc pertinent d’ajouter une source d’information, tierce et de qualité, lente, pour faire des découvertes et lutter contre ce sentiment.
J’ai identifié un titre qui semble répondre à ces critères. Je vous en reparlerai si je suis convaincu. Pour le moment j’ai commandé la quasi-intégralité des numéros (j’aime bien ne pas faire les choses à moitié 😅). Je vais lire tout ça, et si ça me botte, je vous ferai sans doute une vidéo dessus. - Réorganiser des rencontres avec les abonnés. L’air de rien, c’est souvent de chouettes soirées d’échanges où on a parfois de belles surprises (j’avais découvert le travail d’Arnaud, qui est passé sur la chaîne, comme ça). J’ai un peu levé le pied l’année dernière, vu la charge de travail que je me collais, mais il faudrait que je m’y remette.
Si vous n’êtes pas loin de Lille, n’hésitez pas à faire un coucou sur Instagram (le but de ce compte, ça reste principalement d’échanger avec vous de manière moins formelle que le contenu très top-down).
Dans la vie, je pense que les petits changements auxquels on se tient ont des effets, cumulés, plus importants que les gros bouleversements qui ne durent qu’un mois. Sans surprise, ce sont donc des changements plutôt simples. Je vous dirai s’ils ont apporté le coup de frais que j’imagine.
Si vous avez le même sentiment que moi sur votre pratique de la photographie et l’écosystème dans lequel elle s’inscrit, n’hésitez pas à partager vos conseils en commentaires. Il y a sans doute plein de bonnes idées auxquelles je n’ai pas pensé.
Conclusion
Je peux maintenant répondre assez facilement à la question titrant cet article : c’est moi ET on se fait chier. Indéniablement, le point où en est ma pratique de la photographie a un impact sur la perception que j’en ai, mais je pense aussi qu’il est raisonnable de dire que le monde de la photographie, dans son ensemble, se situe à un tournant. Dans une période de transition. Comme il l’a été avec l’arrivée du numérique, puis d’internet.
Comme je vous avais prévenus, l’article avait une tournure un peu plus personnelle que d’habitude, avec l’espoir que vous y trouviez des similarités avec votre pratique et vos réflexions sur le sujet. Je ne vous cache pas non plus qu’il y avait un petit côté « fallait que ça sorte » assez cathartique à le faire.
Après l’avoir lu, dites-moi tout. Est-ce que vous percevez ça aussi ? Comment vous vous sentez dans votre pratique de la photographie en ce moment ? Êtes-vous enthousiastes ?
On en discute ensemble dans les commentaires.
À la prochaine. ✌🏻
Tradition oblige, voici la playlist de toutes les playlists. Mon top des 365 derniers jours :
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