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L’intelligence artificielle va-t-elle tuer la photographie ?

On assiste à une ébullition technologique. Et à l’inverse des NFT, je ne vais pas mettre un an avant de me décider à en parler. À la vitesse où le domaine évolue, chaque durée est de toute façon trop longue. Cet article n’est pas sorti qu’il est sans doute, déjà, un peu dépassé. Autant y aller, je le regarderai sans doute dans quelque temps avec un regard amusé.

Ce n’est pas pour autant que l’on n’essaiera pas de trouver certains mécanismes, tendances, façons de comprendre cette évolution technologique.

Tout d’abord, de quoi on parle quand on parle « d’intelligence artificielle » ? Eh bien des intelligences artificielles génératives. Parce que dans l’absolu, des intelligences artificielles stricto sensu on en a déjà beaucoup, partout, et depuis longtemps. Mon appareil photo qui mesure la lumière et fait la mise au point tout seul, il fait déjà preuve d’intelligence et il n’est pas tombé d’un arbre. Mais là, on parle d’un cran au-dessus.

Je ne vais pas plus rentrer dans les détails, la chaîne YouTube ScienceEtonnante a fait deux excellentes vidéos sur le sujet (Vidéo 1, Vidéo 2). Ce qu’il faut retenir, c’est qu’on a, depuis quelques années, entraîné des réseaux de neurones (informatiques) à reconnaître des trucs. Des chiens, des chats, des factures. Et puis on s’est dit que, bon, s’ils savaient dire « poney » en en voyant un sur une image, ils pourraient sans doute produire une image si on leur dit « poney ».

C’est comme ça que sont apparues les intelligences artificielles génératives, dont celles produisant des images et qui sont l’objet du jour.

Ps : Dans la suite de l'article, pour plus de lisibilité, j'abrègerai "Intelligence Artificielle" en "IA", pour parler des intelligences artificielles génératives.

Vont-elles tuer la photographie et remplacer tous les photographes ?

Regardons ça

Quand la technologie évolue plus vite que les Pokémons

Pour bien comprendre cette effervescence, dites-vous que l’on assiste à une explosion cambrienne de l’IA. Cela va plus vite que vous ne le pensez, dans beaucoup plus de directions et de domaines d’applications (à ce titre, cet article liste de nombreux cas d’usages intéressants).

Quand je vous dis que ça évolue vite, c’est vite. Ci-dessous, vous pouvez voir un exemple trouvé sur Twitter de ce que donne l’IA Midjourney (la plus connue pour générer des images) quand on lui demande de représenter « une loutre dans un avion utilisant le WiFi ».

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Personnellement, je ne peux pas m’empêcher d’être bluffé par l’évolution de cet outil en seulement 6 mois. On est passé d’un truc rigolo et potache qui rendait des résultats improbables à… des images exploitables et correspondant à la demande. D’où l’inquiétude des professionnels de l’image face à l’émerge de cet outil.

Et dites-vous qu’il ne s’agit que d’une application de l’IA. On retrouve les mêmes bonds technologiques pour la génération de texte, avec ChatGPT notamment (dont on reparlera).

L’IA et l’éthique

Bien évidemment, cette percée technologique ne va pas sans quelques problèmes éthiques. Ces intelligences, pour devenir aussi efficaces, on dû être entraînées sur des corpus d’images. Corpus d’images dont les auteurs n’ont pas spécialement donné leur accord pour qu’ils soient utilisés à ces fins.

Ainsi, une requête demandant à Midjourney de produire l’image d’une fille afghane nous renvoie des propositions étrangement familières.

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Exemple de requêtes pour les mots « Afghan Girl » sur Midjourney (source)

Si familières qu’il semblerait même que la requête « McCurry » ait été bannie de Midjourney. Une façon, sans doute, de mettre le problème sous le tapis. Et ça n’est pas le seul cas, l’application Lensa a aussi suscité des colères, tant le style de certains artistes (n’ayant rien demandé) pouvait s’y retrouver.

Alors, oui, les artistes se sont toujours inspirés des générations précédentes. Les peintres apprenaient en copiant les toiles de maître, mais on peut légitimement se demander si cette appropriation (mécanique et aveugle) ne va pas un peu loin. Pourquoi acheter une reproduction d’une image de Steve McCurry, quand je peux en obtenir une en HD en quelques clics, libre de droits, et la faire tirer chez moi ?

Ps : D'ailleurs, au sujet de l'utilisation des images en ligne et de la réalisation de tirages, je vous renvoie vers cette vidéo où j'avais abordé le sujet.

Personnellement, je pense qu’on n’est qu’au début du traitement de ce sujet, on n’a fait qu’effleurer le problème et l’appareil juridique n’est pas du tout prêt à y faire face. M’est avis que les prochaines années (et la résolution des quelques procès intentés) nous éclaireront sur ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, en matière d’entraînement et de reproduction d’images. Après, il faut aussi garder à l’esprit que ces IA évoluent très vite, singent de moins en moins et qu’il est possible que cette problématique disparaisse d’elle-même.

Un accélérateur vers l’ère de la postvérité

Si vous en aviez marre que vos parents viennent vous embêter avec des théories farfelues qu’ils ont découvertes sur Facebook… je suis désolé de vous dire que vous n’avez pas fini d’en chier.

Depuis quelques années (et notamment grâce au mandat de Trump), nous avons mis les pieds dans l’ère de la postvérité (de façon plus franche qu’avant, disons). Les « faits alternatifs » sont apparus, comme si la vérité n’existait plus.

Alors, oui, la photographie, ça n’a jamais été « la vérité ». Mais son lien avec le réel (dont on reparlera dans la suite de cet article) lui a souvent conféré l’aura de la preuve. Elle rapporte les faits, documente (d’où les « reporters » et la photographie « documentaire »). Mais comment continuer à y croire quand Midjourney peut produire ce genre d’images ?

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Dans le feu de l’actualité, sur les différents fils que l’on scrolle à l’infini sur nos smartphones, il est facile de se faire berner. Certes, ces images ont des défauts, sont un peu lisses, ont des détails parfois étranges. Mais on vient de constater les progrès faits en seulement 6 mois ; qu’en sera-t-il dans 2 ans ?

Et encore, je vous parle d’images d’actualités, pour les images historiques, il est déjà quasiment impossible de voir qu’il s’agit de fausses photographies. Le meilleur exemple que j’ai trouvé sur le subreddit de Midjourney est le “Great Cascadia”, un tremblement de terre ayant eu lieu dans l’Oregon en 2001… alors qu’il n’a jamais existé.

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C’est sans doute l’un des plus grands torts faits à la photographie par l’IA : la faire plonger dans l’ère du doute permanent.

Une histoire de lien

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Et justement, l’impact sur la photographie, parlons-en.

Nous avons donc une technologie révolutionnaire, évoluant très vite, qui en s’inspirant d’images peut en proposer une infinité. La question se pose donc : quel va être l’impact sur la photographie ? Va-t-elle en sonner le glas ?

Eh bien, pour y répondre, il va nous falloir nous pencher sur ce qu’est la photographie, ce qui en compose l’essence irréductible. Parce que, oui, vous allez voir, ça va pas mal nous éclairer.

Tout d’abord, pourquoi chercher à la réduire à l’essentiel ?

Parce que le nombre de définitions et d’approches est assez large. J’en avais fait l’expérience dans cet article collaboratif, où plusieurs photographes expliquaient ce que c’était pour eux, et où les réponses divergeaient beaucoup.

D’ailleurs, l’article faisait référence au livre Qu’est-ce que la photographie ? de Clément Chéroux (lecture que je vous conseille au passage). Si l’on regarde la table des matières, au dos de l’ouvrage, la photographie serait (à la fois) :

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Chéroux, C. (2015). Qu’est-ce que la photographie? . Editions Xavier Barral.
  • Des envies (Le désir de voir, Une attirance pour la lumière, Un théâtre d’ombres, Un regard) ;
  • Des matériaux (De la gélatine, Des grains d’argent, Des promesses, Une surface sensible) ;
  • Des principes (Une insolation, Une camera obscura, Une fixation, Une praxis, Un point de vue, Un cadre, Une profondeur, De l’automatisme, Des surprises) ;
  • Une alchimie (Une phase obscure, Une chose ou son contraire, Une allégorie de la caverne) ;
  • Un écart (Ce qui demeure, Des reflets, Un surcroît d’aura, Une interprétation symbolique) ;
  • Des ressources (Des supports de diffusion, Une réduction du monde
    Des clefs pour comprendre, Une énigme insoluble) ;
  • Des vérifications (Une manière de faire la vérité) ;
Ps3 : Le livre s'amuse beaucoup de la multiplicité des réponses à la question "Qu'est-ce que la photographie ?". C'est devenu une sorte de running-gag, où à chaque évolution technologique le sujet revient sur la table. Les livres et théories traitant du sujet sont légion.

L’IA peut parfaitement remplacer certaines de ces caractéristiques, et pas du tout d’autres. Ce qui, au final, ne nous avance pas beaucoup. D’où l’approche un brin essentialiste : voyons ce qui est commun à toutes les photographies depuis le départ et regardons si l’IA peut les remplacer.

Et pour le coup, c’est facile de trouver la réponse : ce qui est commun à toutes les photographies c’est leur lien au réel. C’est le fameux « le réel adhère à la photographie » de Roland Barthes, dont j’avais parlé ici :

Toute photographie a un lien avec le réel.

Un jour, il y a bien longtemps, je tombai sur une photographie du dernier frère de Napoléon, Jérôme (1852). Je me dis alors, avec un étonnement que depuis je n’ai jamais pu réduire : « Je vois les yeux qui ont vu l’Empereur. »

Roland Barthes, La chambre claire

C’est leur point commun, c’est ce qui fait la différence entre une photographie abstraite et un dessin ultra réaliste : l’une découle du réel, pas l’autre.

  • Le dessin ne deviendra pas une photographie parce qu’il est réaliste, il n’a pas ce lien, ce n’est pas dans sa nature.
  • Une photographie ne devient pas un dessin si elle tend vers l’abstraction et qu’on ne reconnaît plus le réel dedans.
  • De même, une photographie prise par un radar autoroutier est nulle, inintéressante, mal définie, mais ça reste une photographie pour ces raisons.

Il n’est pas question de qualité, d’usage ou d’intention, juste de la présence (ou non) d’un contact avec le réel.

Et c’est ça qui va permettre de voir ce que l’IA pourra remplacer ou pas. Ces IA génératives n’ont pas d’accès au réel. Cela viendra peut-être un jour, où on verra des petits robots se balader dans la rue avec des appareils photo et des vestes à poches, mais ce n’est pas encore le cas.

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Midjourney V28 par Midjourney

Il est donc facile de tracer une ligne : pour les photographies où le lien au réel importe peu, l’IA pourra faire le job. Si le lien au réel est important, le travail du photographe ne pourra pas être remplacé. Par exemple, impossible d’imaginer que l’on pourrait faire faire par une IA ses photographies de mariage. On veut capturer l’instant, sa réalité. Mais pour du packshot, ça sera une autre histoire.

Mais avant de regarder ça plus en détail, penchons-nous sur les limites de la photographie. Parce que, oui, cela marche aussi dans l’autre sens. Les photographes n’ont pas attendu le XXIe siècle pour se détacher du réel.

Des limites plutôt floues…

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que cette adhérence du réel n’est pas binaire. Ce n’est pas « oui il est là, c’est de la photographie » VS « non il n’y est pas, c’est autre chose ». C’est un nuancier, où l’on s’en éloigne progressivement.

On retrouve d’ailleurs la même chose dans la musique. Petit à petit, en modifiant des éléments, on passe d’un genre à l’autre. Par exemple, le rock est caractérisé par une mélodie vocale dominante, souvent accompagnée par une ou plusieurs guitares électriques, une basse et une batterie. Si on supprime le chant et que l’on remplace les autres éléments par des instruments numériques, on s’approche doucement de l’électro. Ce qui donne, surprise, le morceau Robot Rock des Daft Punk. Pile à la frontière.

À ce sujet et pour la photographie, j’avais d’ailleurs produit cette vidéo :

De même, Laurent Breillat, sur sa chaîne, avait fait une présentation du livre The Book of Veles de Jonas Bendiksen. Là encore, il s’agit d’un livre de photographies, mais qui joue avec les frontières de la réalité et du vrai. Si les décors sont de véritables photographies prises sur sites, les personnages sont des créations numériques, tout comme les textes qui sont, de mémoire, produits par des intelligences artificielles. Vous pourrez en apprendre plus ici :

Je considère que les projets présentés dans ces vidéos sont de la photographie : le lien avec le réel est présent. Ténu, joué et modifié, mais présent. Je ne partage pas, par exemple, la position de Jonathan Bertin qui consiste à considérer que toute création plus ou moins photoréaliste est de la photographie (cf. l’échange twitter ci-dessous).

Passé un certain cap, quand l’ordinateur a produit l’essentiel de l’image qui n’a plus aucune connexion avec le réel (et donc très loin de ce qui fait la photographie), il ne me semble pas déraisonnable de considérer que ça n’en est plus. C’est autre chose, ni mieux, ni moins bien. Comme pour la musique, on change de registre.

Donc, pour en revenir à nos moutons : si les photographes s’éloignent parfois du réel dans leurs travaux… l’IA, elle, s’en approche de plus en plus. Au point de produire des images photoréalistes assez bluffantes. S’il a fallu plusieurs centaines d’essais à la rédaction de Réponse Photo pour générer cette image, le résultat n’en est pas moins spectaculaire (et le fait d’en faire une couverture montre bien la prise de conscience des acteurs du secteur).

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Réponse photo – Ceci n’est pas une photo

Ainsi, pour résumer :

  • Le lien au réel, son adhérence, est au cœur de la photographie,
  • Celle-ci s’éloigne parfois du réel à des fins créatives et artistiques,
  • À l’inverse, l’IA sait s’en approcher au besoin,
  • Je pense donc que l’IA a la capacité de remplacer la photographie dans les cas où ce lien n’a aucune importance.
  • À l’inverse, l’IA ne sera pas capable de remplacer la photographie quand le lien au réel sera important.

Et il est temps de voir ça.

Quels domaines de la photographie l’IA va-t-elle tuer ?

Le premier domaine que je vois disparaître à cause de l’IA, c’est tout ce qui concerne l’illustration. Enfin, pour être plus précis : qui est déjà en train de disparaître. Je mets là-dedans le packshot produit, les banques d’images et ainsi de suite. Toutes les images remplaçables, qui n’ont pour but que d’illustrer un article, une page web, une page de vente et cie.

Depuis l’émergence des banques d’images, la valeur intrinsèque de ces images avait déjà fortement diminué (il existait même des banques gratuites comme Unsplash). Je pense que l’arrivée de l’IA va les faire tomber à zéro.

Si je mets le packshot là-dedans, c’est pour la simple et bonne raison qu’une partie était déjà faite numériquement. Je doute fortement que la bouteille de bière de cette publicité ait un jour été photographiée :

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Quelle est la part d’ordinateur, déjà, là-dedans ?

Je ne serai pas étonné que l’intégralité de cette image ait été produite par un graphiste à partir de modèles 3D. À partir de là, pourquoi ne pas filer 10 exemples à une IA et la laisser faire la prochaine ? Sachant que les technologies pour faciliter la capture et le traitement de ces images sont déjà en train d’arriver sur le marché.

Quant aux photographies d’illustrations, le constat est déjà sans appel. Avec Laurent Breillat, nous avons préparé la mise en ligne d’un pack de formations sur les projets photo. Pour préparer la page de présentation, nous avions besoin d’images. Voyez ce que Midjourney nous a produit :

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  • Laptop - L'intelligence artificielle va-t-elle tuer la photographie ? - Thomas Hammoudi - Histoire
  • Livre - L'intelligence artificielle va-t-elle tuer la photographie ? - Thomas Hammoudi - Histoire

Pour seulement 10$ par mois, je peux générer des images sur mesure qui correspondent parfaitement à mon besoin. Elles sont uniques, libres de droits, utilisables immédiatement. Pour quelles raisons est-ce que j’irais m’embêter à passer des heures à fouiller un site comme Getty Images, pour trouver un truc approximatif et qui me coûtera plusieurs centaines de dollars ? Le match semble déjà plié.

Vous pourriez penser que je ne suis qu’un odieux technophile (ça me changera de passer pour un conservateur nostalgique de la HP5+ ), mais en réalité, la presse tout comme le commerce en ligne sont déjà en train de basculer. Qu’il s’agisse de Levi’s qui souhaite plus de diversité, du Figaro, pour illustrer un article sur les successions, ou encore de So Foot, il n’est pas bien difficile de trouver des exemples.

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Ce qui est marrant, c’est que le Figaro, après s’être fait alpaguer sur Twitter pour cette pratique, a changé l’image. Sauf que, bon, la nouvelle image est parfaitement lisse et générique et… pourrait totalement être générée par une IA. Cela donne plus l’impression que l’on continue de faire semblant, quelque temps, pour rassurer ceux qui veulent l’être.

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L’image de remplacement, sauvant les apparences.

Mais dans l’absolu, il ne faut pas se faire d’illusion. Les organismes de presse ont déjà du mal à payer les photographes dans les temps (quand les entreprises, elles, ne proposent pas simplement de les payer en « visibilité »), elles ne vont pas mettre longtemps à préférer payer une machine pour produire des images sans valeur perçue.

L’autre endroit où ça va commencer à sentir le roussi dans pas très longtemps, c’est chez les photographes amateurs qui produisent des images génériques et sans trop de créativité. Les couchers de soleil, les paysages, les champs de lavande. Quel va être l’intérêt d’acheter un appareil à plusieurs centaines d’euros, de se former, de se lever à 5h du mat’, d’aller randonner pour faire ce qu’une IA peut faire en 5 minutes ?

D’ailleurs, année après année, les ventes d’appareils photo sont en baisse, je ne pense pas que ça aide à inverser la tendance.

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Ventes d’appareils photo, en millions – CIPA (source)

Si vous ne me croyez pas, prenons un exemple tout simple :

Si je demande à Midjourney de me produire des images en lui décrivant la scène, il me produit ça en moins de 5 minutes (la tâche ne devait pas être assez complexe pour lui a priori).

Road winding down forest hills - L'intelligence artificielle va-t-elle tuer la photographie ? - Thomas Hammoudi - Histoire
Les images de Midjourney V5

J’expliquais plus haut que l’IA pourrait aisément remplacer les images dont le lien au réel n’est pas important. C’est le cas ici. Oui, c’est le Jura, d’accord, mais à part ça ? On a un endroit vallonné, au coucher du soleil, ça pourrait être les Ardennes belges, la Forêt noire ou le Vercors, que ça ne changerait rien. On parle d’images servant à décorer les salles d’attente de nos chers dentistes, là.

Si je doutais déjà de l’intérêt de les produire, qu’en sera-t-il dans 2 ans ?

Souvenez-vous de l’évolution de ces technologies en seulement 6 mois. On peut raisonnablement se demander si les gens se fatigueront encore à produire ce genre de choses dans quelques années. Après, j’observe déjà que quelques photographes ont senti le coup venir et utilisent leurs images passées, leur sens de la composition et leur maîtrise de ces outils pour prendre de l’avance.

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Création numérique – Fawn & Flore (source)

Thierry de Fawn & Flore (qui vendait des photographies de nature), a déjà commencé à les générer via l’IA. Et il a bien raison, une image d’abeille est une image d’abeille, non ? Quel photographe pourrait prétendre réinventer « L’abeille qui butine de la lavande au coucher du soleil » avec son appareil ? Autant gagner du temps et laisser Midjourney faire son œuvre.

Au-delà de ça, on peut même utiliser ces IA pour produire des images intrigantes, comme ici des vues de Lille dans le style de Luigi Ghirri (Source : Midjourney/Laurent Breillat qui est devenu mon petit assistant IA pour ce billet ).

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Bref, si je ne donne pas cher de l’image d’illustration, je parie encore moins sur la photographie de décoration de salon. Mais ce n’est pas pour autant que la photographie d’auteur, avec un véritable propos, soit amenée, elle, à disparaître. Au contraire. Personnellement, je la trouve d’autant plus intéressante dans ce contexte et surtout… irremplaçable.

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Morvan, Y. (2022). Gang Story. Paris: La manufacture de livres.

Quand Yan Morvan photographie les gangs pendant plusieurs décennies pour en faire un livre magistral, on imagine mal son travail être remplacé par celui d’une machine. Ce qui fait l’intérêt de cet ouvrage, c’est la réalité qu’il a côtoyée et en face de laquelle il nous met. Les gangs, leurs codes, leurs histoires. Tous les petits détails, même recréés à l’identique, n’auraient pas le même poids que le « ça a été » que l’on peut voir là.

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Au final, je ne me fais pas tellement de soucis pour la photographie d’auteur. Les artistes continueront de jouer avec les limites de la photographie comme ça a toujours été le cas. L’IA pourra en devenir une composante et sans doute nous apporter plein de problématiques intéressantes, mais jamais la remplacer.

Donc, maintenant qu’on a traité quelques pratiques photo en détail, il est grand temps de lancer les paris.

Bien évidemment, je ne suis pas un oracle, je n’ai pas non plus la science infuse et la liste que je vais vous faire n’est que mon meilleur pari, en prenant en compte les éléments que je viens de vous présenter. Ceci étant dit, démarrons.

Dans la catégorie « pratiques qui vont rester, t’inquiète pas trop 👍🏻✅ », je mettrais :

  • Toutes les pratiques qui consistent à photographier des gens précis dans une situation précise. En fait, j’allais vous faire une liste à la Prévert, mais on peut englober plusieurs pratiques sous cette appellation, comme :
    • La photographie de mariage, de naissance, de couple, de classe et ainsi de suite. Évidemment, quand vous voulez des photographies de votre mariage, vous voulez des photographies de l’événement, pas des images produites par une IA. De même, il y a peu, j’ai fait des cartes de remerciement à destination des proches (suite à la naissance de ma fille), bah, je n’ai pas demandé à Midjourney de me générer des photographies de bébé (bien que ça aurait pu être très drôle).
    • Tout ce qui concerne le reportage et l’actualité, pour les mêmes raisons. Si certains évènements répétitifs peuvent être illustrés d’images générées (pour un article sur une manifestation, pourquoi pas, ponctuellement), pour tout le reste c’est impossible. Bien que cette affirmation ne soit pas valable dans l’autre sens, on observe déjà des cas d’images reprises dans la presse dont on doute de l’origine.
    • Le documentaire, évidemment. C’est un genre qui rapporte des faits par l’image (il « documente »), c’est un peu compliqué de laisser une IA inventer ça.
    • La photographie de « souvenir » (vacances, voyages, famille et ainsi de suite).
  • De façon plus terre à terre, la photographie immobilière. Si vous êtes à la recherche d’un bien immobilier, vous n’allez pas acheter un truc que Midjourney a inventé.
  • La photographie de mode. Toujours pour les mêmes raisons : si vous faites la promotion du travail d’un créateur, il faut des images du travail du créateur. Rien n’empêchera n’importe qui de tenter d’inventer des tenues avec de l’IA, mais je doute fortement que Midjourney fasse la couverture de Vogue demain. Et même plus largement, la photographie de mode a toujours été assez liée à des photographes à l’identité très marquée (je pense à Irving Penn, Richard Avedon, Annie Leibovitz, Guy Bourdin et Paul Outerbridge pour ne citer que les plus connus), c’est un peu dans son ADN.
  • Toutes les prises de vues techniques, aériennes, les relevés, etc. Là aussi, on veut de l’information, pas de l’imagination.
  • Généralement, les pratiques artistiques personnelles. En tout temps, les artistes et a fortiori les photographes se sont amusés des limites de leur médium, je ne vois pas trop ce que l’IA changera là-dedans. Les photographes qui ont des choses intéressantes à raconter avec leur art continueront de le faire, avec les outils qui leur plairont.

Dans la catégorie « j’ai des doutes, ça pue un peu 🦨 », je dirais :

  • La photographie corporate. J’ai hésité à la mettre dans la catégorie précédente, mais je ne suis pas ultra confiant. Simplement, si demain une IA est capable de transformer un selfie en une image professionnelle utilisable sur LinkedIn (et vu les progrès des algorithmes on n’en est plus très loin), je pense que pas mal d’entreprises vont renoncer à passer par les services d’un photographe, encore une fois pour une question de coût. Oui, les grands groupes pourront se le permettre… mais une PME ? Si elle peut économiser 1 000 à 2 000 € ? Ce n’est plus certain.
  • Et dans le même esprit… la photographie de portrait. Alors, elle aussi aurait pu aller dans la catégorie précédente, mais elle va quand même s’en prendre un coup. Disons que toutes les prestations « bas de gamme » (les photos d’identité, les portraits professionnels ou assez simples) vont devoir faire face à la concurrence d’applications de plus en plus redoutables. Si en chargeant dans mon téléphone un selfie, je peux avoir 10 photos de moi bien cadrées, éclairées et composées… pourquoi faire appel à un photographe ? En revanche, je ne doute pas que les prestations plus haut de gamme et qualitatives continueront à exister.

Et enfin, dans les : « ça sent le sapin 🎄🛑 »

  • Évidemment, il y a les 2 types de photographies que j’ai détaillés juste avant, je ne vais pas revenir dessus. On parle bien sûr de l’illustration et de la photographie à vocation décorative. Si mon gagne-pain c’était de remplir Getty image, je pense que je commencerai à m’inquiéter.
  • Il y a aussi tout ce qui concerne le e-commerce que l’on a effleuré avec la publicité Levi’s ci-dessus. Filer une maquette de ses produits à une IA et la laisser habiller des modèles numériques avec va devenir de plus en plus simple et économiquement intéressant.

Voilà, si je devais faire des paris, ça serait ceux-là. J’en rajouterai ultérieurement si je vois que j’en ai oublié (sans modifier ceux-là, on va jouer franc jeu). Si vous en voyez d’autres, n’hésitez pas à les partager dans les commentaires.

Une technologie de plus en plus facile

Là aussi, il serait tentant de vous dire « bon OK, ces IA sont très capables et vont changer pas mal de choses. Mais c’est un truc de geek ou d’informaticien, ce ne sera jamais à la portée de tout le monde ». Eh bien, là aussi, détrompez-vous.

Ces IA sont conçues pour être de plus en plus faciles à utiliser, comme le montre cet exemple dégoté sur Twitter. Vous pouvez voir à quel point Midjourney comprend mieux l’utilisateur entre la V4 et la V5 et a besoin de beaucoup moins de détails pour aboutir à une image réussie.

  • Fsk2qsixoaqomtj - L'intelligence artificielle va-t-elle tuer la photographie ? - Thomas Hammoudi - Histoire
  • Fsk2qsjxgamdffo - L'intelligence artificielle va-t-elle tuer la photographie ? - Thomas Hammoudi - Histoire

Pour le moment, l’UX-UI de Midjourney est catastrophique. Il faut se créer un compte Discord, ouvrir un serveur, inviter le robot, lui lancer des requêtes, bref, c’est la galère. Mais ça ne durera pas. De ce que j’ai compris, ils travaillent sur un site web. Il faut garder à l’esprit qu’ils ne sont que 11 à l’heure où j’écris ces lignes, et que c’est un peu une équipe d’ingénieurs qui a été dépassée par son produit. Leur usage va devenir de plus en plus simple au fil des mois et se rapprocher de ce dont on a l’habitude : des apps et des sites web conçus pour le grand public.

Comment exploiter l’IA quand on est photographe ?

Chaque progrès technologique apporte son lot de destructions et de créations. C’est la fameuse destruction créatrice de Shumpeter. Le téléphone portable a rendu les cabines téléphoniques inutiles. Le streaming a fait fermer les vidéo clubs et ainsi de suite. Logiquement, il en va de même pour l’IA. Si certaines branches de la photographie vont être mises à mal, d’autres opportunités vont se créer.

Richie avait d’ailleurs fait un article sur le sujet, où il pousse la réflexion jusqu’à l’absurde en faisant concevoir un projet à ChatGPT, pour le faire réaliser ensuite par Midjourney.

Plus sérieusement, je vois plusieurs cas où l’IA peut aider les photographe dans leur travail. Je vais vous parler de quelques cas que j’ai vu passer, soit des prototypes soit des choses déjà exploitables. L’IA peut donc vous aider pour :

  • La retouche d’image. Je n’ai pour le moment rien vu passer de totalement fonctionnel et exploitable, mais seulement des démos. L’idée est de filer vos images (avant et après retouche) à une machine, pour qu’elle apprenne à le faire à votre place (ça s’appelle du machine learning). Je sais qu’Adobe a un programme de recherche sur l’IA, Adobe Sensei, et ça ne m’étonnerait pas que l’on voie débarquer ce genre d’outils dans les années qui viennent. Ce qui me va bien : si une machine peut effectuer à ma place 80 % du boulot répétitif et me laisser gérer les spécificités, je prends.
  • La recherche. Pour vos projets photo, vous pouvez être amenés à faire des recherches. Sur les lieux où vous allez travailler, votre sujet, les travaux similaires ayant déjà été faits, les problématiques liées à votre sujet, et ainsi de suite. Nul doute qu’une IA comme ChatGPT (dans sa version 4) peut vous aider sur ce genre de tâches. Et même vous suggérer des idées et des pistes à explorer. Un véritable petit assistant.
  • La rédaction de textes. Je sais que c’est la bête noire de beaucoup de photographes et c’est normal : s’ils avaient voulu s’exprimer par le texte et pas par l’image, ils auraient fait écrivains. C’est d’ailleurs pour ça que j’y consacre une grosse partie dans ma formation sur la diffusion d’un travail photographique. Mais là aussi, une IA peut parfaitement vous aider. Si vous devez rédiger des textes pour un zine, un site web ou une exposition, en lui expliquant votre travail elle sera capable de vous accompagner. D’ailleurs, les prochaines versions de ChatGPT permettront de charger des images, c’est encore mieux pour bénéficier de son coup de pouce.
  • Les dossiers de candidature. J’en ai parlé il y a quelques semaines avec Cliff Chan (qui était passé sur la chaîne) : c’est une véritable corvée. Si vous voulez décrocher une résidence, une bourse, il faut faire un dossier. Monter un projet, expliquer votre parcours, ce que vous comptez faire et ainsi de suite. C’est très chronophage et le temps que vous passez sur un dossier A n’est pas passé sur un dossier B. Vous devez donc faire des choix, sans savoir s’ils vont payer. Ça pique. Et ici aussi, il est tout à fait possible de gagner un temps considérable avec de l’IA. Je pense que Notion ne serait pas un mauvais outil pour ça, avec sa capacité à gérer des templates et de l’IA. L’idée est toute bête : capitaliser sur l’existant, faire faire à l’IA une partie du travail en se basant dessus, personnaliser les réponses en fonction du sujet. De là, votre travail ne consiste plus à tout faire de zéro, mais à fignoler les détails. C’est sans doute une piste à creuser pour de nombreux photographes.

Ce ne sont que quelques idées qui me viennent des essais que j’ai pu effectuer ces derniers mois. Comme toujours, n’hésitez pas à partager des cas d’usages que vous verriez à destination des photographes dans les commentaires.

Conclusion

Bon, bon, bon.

À la base, ce texte devait être le script d’une vidéo YouTube. Puis le plan n’en finissant pas de s’allonger, je me suis dit qu’il trouverait sa place plutôt ici. C’est compliqué d’écrire sur l’IA en ce moment, et en particulier sur la génération d’images : c’est une technologie florissante, avec de nouvelles avancées littéralement tous les jours. Je pense que j’aurais pu garder cet article 6 mois dans mes brouillons et y rajouter régulièrement des exemples, de nouveaux cas d’usages, des fraudes et ainsi de suite. Mais le plus simple reste encore de le laisser vivre sa petite vie, quitte à revenir sur le sujet plus tard.

Quoi qu’il en soit, je reste convaincu que les IA vont transformer notre façon de créer et de percevoir les images. Comme l’apparition du numérique a changé la photographie il y a une vingtaine d’années, je pense que nous sommes à un nouveau tournant de l’histoire de la photographie. Et il va probablement être passionnant à vivre.

À la prochaine. ✌🏻


Et pour respecter la tradition, je vous laisse en musique, avec ce que j’ai écouté pendant l’écriture de cet article.


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Commentaires

24 réponses

  1. Avatar de Patrick

    Une analyse fine, complète et juste que je ne lis qu’un an après sa publication, et qui est pourtant toujours très actuelle.

    Soit l’IA ne progresse pas si vite, soit l’analyse est complètement dans le vrai…
    😉

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Merci Patrick !
      Bah techniquement ça a progressé, énormément même. Mais dans l’appropriation c’est moins rapide en effet.

      1. Avatar de Patrick

        Nan mais évidemment, que la technologie a vachement progressé (et pourtant on n’en est toujours qu’aux balbutiements).
        Il fallait donc comprendre que ton analyse est complètement dans le vrai !
        😅

  2. Avatar de Thomas Buyle

    Petite réflexion au passage.

    Si l’IA fait plonger la photographie dans l’ère du doute permanent, n’est-ce pas un peu une sorte de « retour de bâton » : volontairement ou non, la photographie a entretenu l’illusion que ses images montraient indiscutablement le réel.

    Je pense qu’on a toujours eu tendance à considérer les photos comme des images à part : comme si elles étaient par nature plus vraies que toutes autres. Et ce même si, comme tu le dis, l’adhérence au réel de la photographie n’est pas (et n’a jamais été) binaire.

    Du coup, on réalise un peu brusquement qu’une photo reste une image comme les autres.

  3. Avatar de hpchavaz
    hpchavaz

    Article très intéressant notamment par l’étendue du champ couvert.

    Les problèmes éthiques de l’IA ne se présentent pas nécessairement sous la forme à laquelle les photographes sont naturellement les plus sensibles. Il me semble nécessaire de bien identifier de quoi l’on parle.

    Par exemple, un premier problème, insidieux, concerne les biais au détriment de certaines catégories de populations, Un prompt pour une personne conduit le plus souvent, même si le biais est en cours de correction, à la production d’une personne disons d’origine européenne.

    Concernant l’apprentissage de l’IA à partir d’oeuvres existantes, il n’est pas clair que cela soit un problème éthique Pour une large part; la levée de boucliers actuelle me semble liée à la protection des droits patrimoniaux des auteurs. Cependant si le droit d’auteur est important, il s’agit, pour ce qui est des droits patrimoniaux, d’une construction juridique assez largement distincte de l’éthique. Que les photographes sans doute dans leur majorité, plus généralement les producteurs d’images ou encore les auteurs d’une oeuvre, souhaitent obtenir une part du gâteau est légitime d’autant plus que l’IA va sans doute affecter leurs professions. Que ce soit un problème éthique est autre chose.

    Concernant le droit moral, principalement l’attribution, l’éthique en cause est plutôt celles des utilisateurs.

    L’exemple de la photographie de Steve McCurry nommée « Afghan Girl » est éclairant. Le fait qu’une IA produise des images similaires lorsqu’on lui demande de le faire n’est donc pas surprenant. Ne pas indiquer de quel auteur l’on a souhaité s’inspirer est dans ce cas le plus contestable.

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Les biais sont corrigés dans la dernière version de #midjourney. Pour l’afghan girl les images ont été obtenues sans mentionner le nom de l’auteur. C’est ça qui était fou. C’est qu’après qu’ils ont banni le nom.

      1. Avatar de hpchavaz
        hpchavaz

        Pas besoin du nom l’auteur, « Afgan Girl » est le nom de la photographie. « Migrant Mother » produit sans doute à un problème identique.

  4. Avatar de Sébastien PELLETIER-PACHOLSKI

    Bonjour thomas,

    Article très intéressant qui pose le sujet avec justesse, et que tu auras sans doute à compléter dans les années (mois!) qui viennent.
    Pour complèter ta réflexion, il est un domaine dans lequel je suis très attentif et un peu inquiet, c’est la photo d’illustration journalistique. On voit déjà des médias pourtant institutionnels commencer à utiliser l’IA pour accompagner des articles. Ceci me pose un vrai problème éthique : quid d’une émeute à Haïti ou Hong Kong, avec une photo générée par AI ? Qui parmi un public non averti verra l’esbrouffe ?
    Je trouvait déjà qu’on allait trop vers des photos survitaminées avec les logiciels tels que Affinity, ou Luminar et ses ciels changeant et changés ! Ou des photos de zones de combat hyperréalistes dont certaines ont été primées.
    Pour ma pratique (la photo de rue), je suis aussi circonspect par l’usage de l’IA par des fauxtographes qui exposeraient des images sans avoir usé leurs semelles sur l’asphalte.
    Il va bientôt falloir présenter ses raw à un galiériste, comme on présente ses papiers à un policier !
    Et là je te rejoins sur la photographie d’auteur, qui restera un domaine artistique que l’IA aura du mal à investir.

    En tout cas merci pour cet article intéressant et documenté que j’ai pris plaisir à lire.

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Merci pour ton retour Sébastien !
      Pour moi, les cas que tu décris sont de la fraude. L’IA fait sens dans l’exemple du Figaro : ça ou une photo de stock, on s’en fout un peu. Et pourquoi s’embêter ?
      Quand il s’agit de rapporter des faits, de faire du journalisme, je trouve ça assez frauduleux d’utiliser une IA. Sauf dans le cas où évidemment, il n’existe aucune image de l’évènement (c’est le cas de Sofoot par exemple).

  5. Avatar de Marie-Françoise
    Marie-Françoise

    Hello, Très à la mode l’IA en ce moment ! On lit et entend tout et nimporte quoi (surtout n’importe quoi !) tous médias confondus !
    Merci pour cet article appliqué à la photographie, documenté, réfléchi et qui pose les bonnes questions. Loin des prédictions péremptoires sur la fin de l’humanté dominée par les robots …
    J’ai « bidouillé » un peu avec Midjourney (et chatGPT ! mais ce texte est de moi…)! bluffant sur certaines requêtes ! Plus « distrayant », surprenant sur d’autres ! MidJourney est très littéral… et pas encore réceptif aux jeux de mot.
    La sexagénaire que je suis a vu beaucoup évoluer la photographie (et pas que !!!). Il faut sans cesse s’adapter, se reéinventer. Et booster sa créativité. On ne s’ennuie jamais 😉

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      En effet ! Après, pour chatgpt et mid journey Ce ne sont pas les dernières versions qui sont publiques. Elles sont un peu plus bêtes que les premium

  6. Avatar de René Strehler
    René Strehler

    Il y a, certes, Midjourney sur internet, mais on y peut aussi acheter des ‘objectifs’ sténopé. 🙂

  7. Avatar de Nazado
    Nazado

    Alors déjà, élaborer une réflexion aussi complète avec une bébée à la maison, moi je dis bravo, respect ! On est tellement aux limites des capacités humaines que je commence à me poser des questions sur ton existence réelle 😁
    Sinon, ton article m’a passionnée en présentant un excellent panorama du sujet et plein de pistes de réflexion. J’ai juste une incompréhension sur la production des photographes amateurs dans la catégorie qui sent le roussi.
    Parles-tu d’amateurs qui font commerce de leurs photos ? Parce que sinon, il me semble que pour nous amateurs, l’intérêt de nos photos c’est justement de les avoir faites nous-mêmes. On fait un lever de soleil pourri mais on est tout fiérot de s’être levé à 5h pour aller le faire (pas moi hein, je me rabats sur les couchers parce que 5h c’est même pas en rêve). Je ne vois pas du tout l’intérêt pour un amateur de générer des photos par IA à moins d’avoir un besoin de reconnaissance inquiétant.

    Peut-être même que la cote d’amour pour les photos amateur va monter. De même qu’on retrouve du charme au imperfections du vinyl après avoir été éblouis par la l’excellence du CD, on s’extasiera devant les ciels cramés et les ombres bouchées. Va savoir …

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Je parlais des amateurs amateurs (sinon, quand on fait commerce, je parle des « pros »). C’est juste que je ne vois plus trop où serait la motivation là-dedans.
      Dans 2 ans, quand les résultats seront parfait, ça aura une odeur de « à quoi bon ? » non ?
      Mais comme tu le dis, seul l’avenir nous le dira.

      1. Avatar de Didier
        Didier

        A l’heure actuelle, si je veux une belle photo de coucher de soleil depuis telle ou telle plage, une simple recherche google me permet déjà de la trouver.
        Les réseaux sociaux sont déjà pleins d’images identiques prises au même endroit. Pour un amateur, dont je suis, je pense qu’il y a le plaisir de prendre des photos, et aussi parfois la fierté de pouvoir dire: c’est moi qui l’ai prise (genre en photographie animalière).
        De même, certains photographient en argentique et/ou développent leurs images parce qu’ils aiment le « processus » en lui-même ou pour prouver leur « maîtrise technique » du procédé.
        La motivation, pour un amateur, elle est déjà de prendre les photos lui-même et de « vivre le moment, l’expérience » que tu prends en photo.
        Après, bien sûr, si c’est seulement pour te vanter sur les réseaux de telle ou telle chose, ou bien vendre des produits en tant qu’influenceur et te mettre en scène, oui, tu iras au plus « rationnel » en terme de simplicité, de coût et de temps.

        1. Avatar de Thomas Hammoudi

          Le problème, dans ce que tu décris, c’est que la photographie n’est plus au cœur de la photographie. Si l’image on s’en fiche et que l’intérêt c’est de l’avoir prise soit même, c’est plus comme tu dis le processus qui est valorisé. La ballade. Manipuler des boutons et des objets, des logiciels. Montrer qu’on sait faire. Je ne sais si une pratique où l’image est reléguée au second plan est encore vraiment de la photographie.

  8. Avatar de Alain ALEXIS
    Alain ALEXIS

    Très intéressant !
    Il y a matière à réflexion … et même si cet article va être dépassé (ou obsolète) rapidement, il est bien de laisser une trace de ses réflexions à un instant t 😉
    Tu évoques un peu la pratique amateure à un moment (un amateur va hésiter à se payer du matos photo, ou des déplacements etc … …), ça me suggère (en vrac):
    – en effet par exemple les ordinateurs (gros puis petits) ont tué la pratique amateure du jeu d’échecs en quelques dizaines années …
    – par contre la phrase « toutes les photos ont déjà été prises, mais pas par moi », incite toujours l’amateur à faire des photos, SES photos, à mener ses petits projets. C’est un peu le côté du « bricoleur » qui préfère faire lui même, plutôt que d’acheter tout fait, c’est le plaisir de créer (à son niveau) et donc de s’exprimer personellement…
    – je fais aussi un parallèle avec la pratique musicale ;). Au début les synthétiseurs essayaient d’imiter les instruments acoustiques (et pas très bien). Puis il y a eu deux voies: l’imitation et la création de sons … La musique et la pratique musicale ont évolué. Et certains amateurs font beaucoup de musique sur synthétiseurs (ou ordis), mais d’autres font beaucoup de musique sur des instruments acoustiques….

    Rendez-vous dans un an ou deux, pour voir si ton article a bien vieilli ! LOL

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Hello,

      Intéressantes ces réflexions.
      Oui, j’avais envie d’un article « dans le feu de l’action ». Y’a pas longtemps j’ai lu Gunthert, A. (2015). L’image partagée: La photographie numérique., qui regroupe ses essais sur l’émergence du numérique, pendant l’émergence du numérique. Il les compile et c’est intéressant de voir sa pensée évoluer. J’ai eu envie de faire un peu pareil à mon échelle.
      L’analogie avec la musique est bonne, on verra ce que ça donne sur la durée, il y aura sans doute une bifurcation entre les « puristes » et les « manipulateurs d’images electro » en sorte.
      Pour les amateurs, je pense que le frein sera toujours les sous, mais on aura la surprise un peu plus tard. Disons que le fait de faire un champ de lavande au coucher du soleil va perdre le peu d’intérêt (le côté performance) qu’il lui restait. A l’inverse, j’me demande si ça ne va pas pousser les utilisateurs à faire « ce que les IA ne peuvent pas faire ». Des images plus personnelles, des corpus plus travaillés. On aura peut-être une belle surprise qui sait !

  9. Avatar de Georges Melon
    Georges Melon

    Très intéressant vraiment. Une question et un commentaire. Tu évoques à juste titre le lien au réel. Il est particulièrement important dans certains domaines tel le photo-journalisme. Penses tu qu’une technologie de « certification de l’origine des images » puisse emerger ? Je ne pense pas à quelque chose de visible sur l’image mais à une sorte de signature numérique dans le fichier garantissant son origine et qui permettrait aux organes de presse de certifier leurs photos. Par ailleurs il est une pratique que tu n’evoques pas et qui, je pense, va rester, c’est la photo souvenir. Si je fais une photo carte postale de la tour eiffel ou d’un coucher de soleil sur la Méditerranée, elle sera sans intérêt pour le commun des mortels (cfr beaucoup de publications sur les sites photos) mais elle peut prendre de la valeur pour moi ou ceux présents ce jour-là en évoquant le moment, les anecdotes vécues.

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Ha oui tu as raison, le souvenir restera. C’était tellement évident que je l’ai oublié 😅

      Pour la certification… Ça sent l’usine à gaz quand même. Ça me fait penser aux problématiques que l’on retrouve dans l’article sur les nft. Sur les autorités centrales et Cie.

  10. Avatar de Jean-François Lairez

    Article très intéressant qui ouvre des perspectives surprenantes et inépuisables.

  11. Avatar de Franck Bricaud
    Franck Bricaud

    Bonjour Thomas, en ce dimanche matin je te lis. Bon article. Comme tu le précises, toute technologie vient remettre en cause ce qui était établi. Mais dans la société actuelle, il y a un fort retour à un besoin du réel, un lien avec la matière, à la simplicité – Alors oui, on ne peut pas échapper à son époque, et l’IA va faire partie de nos quotidiens. Mais…
    En écoutant Bernard Plossu, interview de la semaine dernière, il dit que seul l’argentique permet la vérité, sur le coup je me suis dit qu’il exagère – la vérité peut se mesurer autrement que par le support (de capture) – Mais après la lecture de ton article, n’aurait-il pas raison ?

    1. Avatar de Thomas Hammoudi

      Pas vraiment, dès les debuts de l’argentique les images pouvaient être manipulées. Le cadrage peut faire mentir aussi 🤥. Peut importe le support je doute que la photographie soir la vérité.

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