La vision de Saul Leiter s’appuie sur un œil prompt à absorber les évènements spontanés. Confronté à un réseau très dense de données, de moments fugaces dans l’espace et le temps, il emploie tout un arsenal de stratégies – cadrages obliques, plans s’entrecroisant de manière complexe, reflets ambigus – pour distiller une poésie urbaine parfois empreinte d’une profonde tendresse et d’une exacerbation émotionnelle à couper le souffle. Il prend des risques – méprisant les conventions de la technique photographique et apparemment indifférent aux limites imposées par la photosensibilité des émulsions.
Martin Harrison
La vie new-yorkaise de Saul Leiter
Pour construire une carrière et avoir du succès, il faut être déterminé… Il faut être ambitieux. Je préfère largement boire du café, écouter de la musique, et peindre quand j’en ressens l’envie.
Saul Leiter
Cette citation vient de Saul Leiter. Amoureux de la photographie et de l’art, pionnier de la photographie couleur et dont j’affectionne tout particulièrement le travail, c’est de son œuvre dont il sera question dans cet article.
Saul Leiter est né en 1923 à Pittsburgh, en Pennsylvanie, dans une famille juive orthodoxe. Fils d’un rabbin renommé, il est destiné à suivre les traces de son père et de son grand-père en devenant lui-même rabbin. Dès son plus jeune âge, Saul est habitué à consacrer ses journées à l’étude, il raconte :
Enfant, j’ai été habitué à consacrer mes journées à l’étude. Levé à 5 heures du matin, je m’effondrais au lit le soir. J’ai découvert l’art à la bibliothèque, dans les livres, Picasso, Bonnard, mais aussi les estampes japonaises, les textiles péruviens, l’expressionnisme allemand. Tout m’apparaissait brusquement.
Saul Leiter
Jusqu’en 1946, Saul Leiter suit des cours de théologie talmudique, d’abord à Pittsburgh, puis à Cleveland. Cependant, le poids des attentes familiales devient trop lourd à porter, et il décide d’interrompre ses études religieuses pour se consacrer à l’art. Cette décision est mal vue par son père, ce qui entraîne des tensions durables entre eux. Leiter quitte alors Cleveland pour s’installer à New York avec l’idée de devenir peintre. Il se souvient :
Mon père et mon grand-père étaient des rabbins. J’ai étudié la théologie et quand je revenais de chez mon grand-père, je pouvais répondre à des questions pointues.
Saul Leiter
À New York, Saul Leiter fait d’importantes rencontres qui vont bouleverser son parcours. Il se lie d’amitié avec le peintre expressionniste abstrait Richard Pousette-Dart, qui l’initie à la photographie. Il rencontre également le célèbre photographe William Eugene Smith, qui l’influence profondément. Eugene Smith lui donne plusieurs clichés de son cycle Spanish Village, dont la vente permet à Leiter d’acheter son premier appareil photo professionnel, un Leica 1C.
En 1947, Saul Leiter visite une rétrospective d’Henri Cartier-Bresson au Museum of Modern Art (MoMA) de New York. Cette exposition constitue un déclic pour lui : il décide sur-le-champ de devenir photographe. Il commence à arpenter les rues de New York, capturant des scènes de rue et des portraits en noir et blanc. L’année suivante, il commence à expérimenter la photographie couleur, ce qui deviendra l’un des éléments distinctifs de son œuvre.
Le travail de Leiter attire rapidement l’attention d’Edward Steichen, le conservateur en chef du département de la photographie au MoMA. En 1953, Steichen sélectionne vingt-cinq tirages en noir et blanc de Leiter pour l’exposition Always the Young Stranger. Quatre ans plus tard, en 1957, Steichen intègre une vingtaine de ses images couleur dans une conférence intitulée Experimental Photography in Color au MoMA.
Parallèlement à son travail de rue, Saul Leiter devient un pionnier de la photographie de mode (on va en reparler), développant un style pictural unique, souvent qualifié de « lyrique ». Leiter est également actif comme peintre et graphiste tout au long de sa carrière.
Il est décédé en 2013 à New York, laissant derrière lui un héritage photographique et artistique d’une richesse inestimable.
Rapport à la célébrité
Saul Leiter est un homme discret qui a toujours refusé la notoriété. Cette absence de reconnaissance est aussi due à quelques occasions manquées : il a par exemple refusé d’apparaître dans la légendaire exposition The Family of Man (1955) d’Edward Steichen, pensant que son travail n’était pas au niveau. Il ne revendique aucune place dans l’histoire de l’art, dit même être « un photographe à reculons » et ne comprend pas pourquoi on voudrait l’exposer. Il ne se considère pas vraiment comme un photographe important, et même s’il est l’un des fleurons de la photographie, il reste touchant de par cette humilité.
J’ai passé une grande partie de ma vie en étant ignoré. J’en étais très heureux. Être ignoré est un grand privilège. C’est ainsi que j’ai appris à voir ce que d’autres ne voient pas et à réagir à des situations différemment. J’ai simplement regardé le monde, pas vraiment prêt à tout, mais en flânant.
Saul Leiter
Il n’a appartenu à aucune école, aucun mouvement. Il aura préféré boire son café et écouter de la musique, plutôt que de faire sa promotion.
Je n’ai pas de philosophie de la photographie. J’aime juste prendre des photos. Il me semble que des choses mystérieuses peuvent prendre place dans des lieux familiers.
Saul Leiter
Et comme il le disait au New York Times, refusant par la même occasion toute gloire :
Le culte de moi-même ne m’intéresse pas.
Saul Leiter
Redécouverte
Son travail fut redécouvert tardivement, au milieu des années 1990. Son œuvre bénéficie alors de l’engouement pour la photographie couleur des années 1970, dans lequel il s’incarne auprès d’autres noms comme Joël Meyerowitz ou William Eggleston. Il sort alors de l’ombre avec la parution de la monographie Saul Leiter: Early Color (2006) et l’organisation d’expositions à New York, Paris (fondation Henri-Cartier Bresson), Milwaukee (Milwaukee Art Museum), notamment.
Tomas Leach lui consacre un documentaire : In No Great Hurry: 13 Lessons in Life with Saul Leiter (2012), que je vous conseille de regarder.
Malgré une reconnaissance tardive, Saul Leiter est aujourd’hui considéré comme l’un des photographes d’art les plus innovants en termes d’esthétique formelle. Son œuvre en couleur est souvent mise sur un pied d’égalité avec son travail en noir et blanc. La rétrospective présentée à la Fondation Henri Cartier-Bresson en 2008 a contribué à le faire redécouvrir par le grand public et à le consacrer comme un maître de la photographie contemporaine.
Les différentes facettes de son style
Je crois en la beauté des choses simples. Je crois que la chose la plus inintéressante peut être très intéressante.
Saul Leiter
Intéressons-nous maintenant au style photographique de Saul Leiter. 😀
Ses noir et blanc, ses premières images et toutes les autres, ont principalement été réalisées dans les rues de New York. Elles montrent des silhouettes, des ombres, des visions indirectes entre abstractions et film noir.
Il s’éloigne tout au plus de deux ou trois blocs autour de sa résidence dans l’East Village. Pas besoin d’aller à des kilomètres à la ronde, il compte plus sur sa créativité que sur sa mobilité.
Sa photographie couleur, développée à New York mais aussi à Paris, à Rome ou en Espagne, emploie des tons à la fois vifs et déteints, une absence de contours stricts, qui font de ses photographies des œuvres proches de la peinture, dans l’esprit de Bonnard ou Vuillard, qu’il admire.
Il apprécie aussi le peintre Mark Rothko : on retrouve dans ses photographies la même vibration intérieure des couleurs. Il joue des effets de reflets et de transparence. Ses compositions graphiques transforment la réalité pour créer un mode poétique, flottant, qui engendre une succession infinie de mises en abîme, et tend vers l’abstraction.
Ses images transforment la réalité pour créer un univers poétique et apaisant, sur lequel plane la douceur et la mélancolie. Il travaille la couleur comme une matière, à une époque où elle est réservée à la photographie commerciale, à la publicité et à la mode. Sa façon de cadrer n’appartient qu’à lui, et ne respecte aucune des règles des tiers, du nombre d’or ou autres.
Il ne cherche pas particulièrement à montrer ses sujets en entier, des fragments lui suffisent, et il se sert de tous les éléments à sa disposition pour composer ses images : pluie, neige, buée, reflets, couleurs réfractées, silhouettes anonymes, enseignes… C’est plus un habile créateur d’atmosphères, d’ambiances, qu’un architecte de la composition parfaitement géométrique. Il joue sur les plans pour détourner l’attention du spectateur, comme si les éléments de la rue étaient autant de cadres qu’il juxtapose les uns sur les autres pour mieux éloigner le sujet de son objectif. L’image se retrouve démantelée.
Leiter maîtrise aussi le temps contenu dans ses images. La plupart de ses photographies laissent transparaître l’impression d’un temps figé. Cette suspension du temps est typique de ses photographies. En cela, il dénote avec la tradition de la street photography américaine. Il est très loin de Robert Frank, qui présente un panorama de la vie américaine des années cinquante, entre classe, luxure et misère, ségrégation et promesses de libertés. Rien de tout cela chez Leiter.
On ne trouve pas une bribe de vie, un cliché qui capture le « beau New York », ou qui nous suggère un avant et un après… la photographie de Leiter est ailleurs.
Il se dit d’ailleurs « peintre avant toute chose » (on va aussi en reparler).
La mode
Si c’est pour ses photographies de rue qu’il a longtemps été connu, Saul Leiter s’est pendant longtemps illustré en tant que photographe de mode : il y consacre d’ailleurs la plus grande partie de sa carrière. Contrairement à la clarté visuelle d’un Richard Avedon, Leiter préfère les flous artistiques, les reflets, et les compositions complexes.
En 1953, il ouvre son studio de photographie sur Bleecker Street. Il gagne alors sa vie en tant que photographe de mode. À partir de 1957, son travail est publié dans des magazines prestigieux comme Esquire et Harper’s Bazaar, grâce à son contact avec Henry Wolf, directeur artistique de ces publications. Il devient alors l’un des grands photographes du milieu et travaille pour les magazines de mode les plus prestigieux. Saul Leiter continue de travailler dans la mode jusqu’aux années 1970, tout en réalisant des portraits et des scènes de rue dans des villes comme Venise, Rome et Paris. En 1963, il déplace son studio de Bleecker Street à Lower Fifth Avenue, où il continue de travailler jusqu’en 1981, moment où il abandonne progressivement la photographie de mode.
Quoiqu’il en soit, il verra toujours cette pratique comme quelque chose d’alimentaire :
J’ai vraiment commencé comme photographe de mode. On ne peut pas dire que j’ai réussi, mais il y avait assez de travail pour me tenir occupé. J’ai collaboré avec le Harper’s Bazaar et d’autres magazines. J’ai eu du travail. C’était une façon pour moi de gagner ma vie. J’avais besoin de payer ma facture d’électricité et mon loyer, et j’avais besoin d’argent pour la nourriture. Dans le même temps, j’ai pu faire mes propres photographies.
Saul Leiter
Early Black and White
Paradoxalement, j’ai découvert Saul Leiter, non pas pour son travail en couleurs, mais via le livre Early Black and White, que j’avais dégoté lors d’une énième balade dans une librairie.
Je vous en conseille d’ailleurs la lecture.
L’ouvrage se découpe en deux volumes : Interior et Exterior. Leur titre est trompeur, il ne fait pas référence à son domicile (lieu de vie et extérieur), mais porte sur la vie intime de Saul Leiter : ce qui en fait partie est dans le premier, le reste dans le deuxième. On trouve donc dans le premier des photographies de son père, mais aussi de ses amis et de ses amours. On y retrouve son élégante douceur, une proximité, tant avec le sujet qu’avec le spectateur, que j’aime beaucoup. Comme si tout cela lui était un prolongement naturel de lui-même.
Si vous voulez en voir plus, cette vidéo est très bien :
In My Room
Autre projet que j’aime beaucoup de lui, In My Room. Photographe d’une extrême douceur, c’est bien dans ce travail (mis en forme après son décès, dans un livre) que celle-ci s’exprime le mieux. Il a réalisé des photographies intimes de ses amours pendant trois décennies.
Ce travail a débuté à son arrivée à New York en 1946 et s’est poursuivi jusqu’à la fin des années 1960. Il montre aussi ici l’influence de ses artistes préférés (dont Vuillard et Matisse).
Personnelles et intimes, ces images font partager au spectateur des moments tendres, et sont révélatrices de la confiance que ses sujets lui accordent. Elles révèlent le monde de l’artiste et les femmes qui ont partagé sa vie, à travers des études de la figure féminine.
Souvent éclairées par la lumière naturelle et luxuriante de son atelier dans l’East Village, ces images en noir et blanc se révèlent d’une grande beauté, entre empathie et sensualité.
Dans les années 1970, Saul Leiter avait prévu de faire un livre de ses nus, mais n’a jamais réalisé ce projet de son vivant.
La peinture
Dans cet article, on a pas mal parlé de la passion de Saul Leiter pour la peinture et le graphisme, et du fait qu’il l’ait pratiqué toute sa vie. Même si ce blog est avant tout dédié à la photographie, j’aurais trouvé ça dommage de nous arrêter là sans vous le montrer, surtout que j’aime bien son travail.
Comme vous pouvez le voir, il a beaucoup peint, des œuvres assez colorées, et… il a aussi fusionné un peu les deux, en reprenant certaines de ses photographies (principalement de la série In My Room) avec de la peinture.
Dans un style qui n’est pas sans me rappeler celui de Gustav Klimt, pour la sensualité et la présence récurrente d’un jaune quasi doré.
Qu’en retenir pour votre pratique ?
Nombreuses sont les leçons que l’on peut tirer de Saul Leiter, tant sur l’art, que sur sa pratique ou sa façon d’être. J’en ai retenu quelques unes ici.
Compressez vos images
Leiter, bien qu’il n’ait pas utilisé de téléobjectifs au départ, a vite découvert leur potentiel pour la photographie de rue. La compression des perspectives qu’ils offrent permet de simplifier les scènes et de créer des compositions plus géométriques1. Il aimait expérimenter avec différentes focales pour enrichir son approche visuelle. Pour Leiter, la perfection n’était pas un but en soi, et l’expérimentation était essentielle à son processus créatif.
J’avais un objectif de 150 mm que j’aimais beaucoup. J’ai expérimenté énormément. Parfois, je travaillais avec un objectif alors que j’en aurais préféré un autre. Je pense que Picasso a dit une fois qu’il voulait utiliser du vert dans une peinture, mais comme il n’en avait pas, il a utilisé du rouge. La perfection n’est pas quelque chose que j’admire. [Rires]. Un peu de confusion est un ingrédient désirable.
Saul Leiter
Ne vous préoccupez pas de la célébrité
Leiter a toujours vécu dans l’ombre, loin des projecteurs, photographiant avant tout pour lui-même. Ce n’est qu’à la fin des années 90 que ses images ont commencé à être reconnues. Pour autant, il n’a jamais cherché la célébrité, préférant une vie simple. Il acceptait l’idée que même les artistes les plus talentueux pouvaient passer inaperçus.
Je n’ai jamais été submergé par un désir de devenir célèbre. […] Être ignoré est un grand privilège. C’est ainsi que j’ai appris à voir ce que d’autres ne voyaient pas et à réagir différemment aux situations.
Saul Leiter
La reconnaissance n’est pas un but, c’est même une récompense que certains refusent. Travaillez pour vous-même avant tout, et ne cherchez rien d’autre que votre propre satisfaction.
Cherchez la beauté
Contrairement à de nombreux photographes de rue qui cherchent à capturer une action intense, des layers ou la misère, Leiter se concentrait sur la beauté dans les moments les plus quotidiens. Ses photos sont souvent empreintes de douceur, avec des pastels, des reflets, et une lumière subtile. Il ne cherchait pas la beauté dans des lieux exotiques, mais dans les détails simples de la vie urbaine.
Je n’ai jamais pensé que l’environnement urbain était isolant. […] On n’a pas besoin d’être dans un pays lointain pour trouver la beauté. Je réalise que la recherche de la beauté n’est pas très populaire de nos jours. L’agonie, la misère et la détresse, voilà ce qui mérite d’être poursuivi.
Saul Leiter
Il n’y a donc pas besoin d’aller très loin de chez soi pour faire un travail créatif, et en cela, il est proche de William Eggleston. Travaillez votre créativité et votre façon de voir votre environnement, notamment en jouant avec les plans dans vos compositions.
Apprenez à regarder
Pour Leiter, la photographie permet d’affiner notre capacité à voir. Il croyait qu’en pratiquant la photographie, on apprend à regarder le monde d’une manière plus riche, à remarquer des détails que l’on aurait autrement ignorés. Ce n’était pas seulement les photos qu’il prenait qui comptaient, mais aussi sa capacité à voir des choses qu’il choisissait de ne pas photographier.
La photographie vous apprend à regarder et à voir. Et en photographiant, le monde devient un endroit beaucoup plus riche, plus juteux visuellement parlant. Parfois, c’est presque insupportable – c’est trop intéressant. […] Ce n’est pas toujours les photos que vous prenez qui importent. C’est aussi le fait de regarder le monde et de voir des choses que vous ne photographiez jamais, mais qui pourraient être des photographies.
Saul Leiter
Ne vous encombrez pas d’une philosophie
Leiter n’était pas un photographe théoricien. Il ne réfléchissait pas en termes de grandes idées ou de concepts philosophiques quand il sortait avec son appareil. Il capturait simplement ce qui l’intéressait, sans prétention. Pour lui, la photographie était un acte spontané, sans besoin de justification intellectuelle.
Je n’ai pas de philosophie. J’ai un appareil photo. Je regarde dans l’appareil et je prends des photos. Mes photographies sont la plus petite partie de ce que je vois qui pourrait être photographié.
Saul Leiter
Restez humble
Malgré son talent, Leiter est resté humble tout au long de sa vie. Il n’a jamais cherché à s’imposer ou à conquérir le monde de la photographie. Il préférait profiter de petits plaisirs simples comme boire du café ou écouter de la musique. Pour lui, une vie bien vécue n’était pas synonyme de succès ou d’accomplissements grandioses, mais de moments de tranquillité et de plaisir simple.
Je ne suis pas immergé dans l’auto-admiration. Quand j’écoute Vivaldi ou de la musique japonaise ou que je prépare des spaghettis à 3h du matin et que je réalise que je n’ai pas la bonne sauce, la célébrité ne sert à rien.
Saul Leiter
Il n’y a pas forcément besoin de se consacrer à temps plein à son art pour être épanoui. Leiter avait un boulot alimentaire, et s’en est très bien sorti.
Inspirez-vous de la peinture
Leiter était autant peintre que photographe, et cela se ressent dans son travail. Son approche de la composition et de la couleur était profondément influencée par les mouvements artistiques comme l’abstraction et l’expressionnisme. Il puisait souvent son inspiration dans la peinture, ce qui ajoutait une dimension unique à ses photographies.
Ne regardez pas seulement les photographes pour vous inspirer. Étudiez l’histoire de l’art.
Conclusion
Souvent admiré, mais aussi imité et copié, Saul Leiter a laissé une empreinte bien à lui dans la grande histoire de la photographie, même si elle est apparue tardivement. Bien qu’il ait été très admiré par ses pairs, qui connaissaient son travail, il a passé l’essentiel de sa vie en étant inconnu du monde des beaux-arts et du grand public. Preuve indiscutable que la photographie peut être satisfaisante en elle-même.
Je vous laisse méditer là-dessus.
Ah et, cette fois, je me suis plongé dans la musique électronique. J’avais envie de découvrir un peu ça, et j’me suis acheté un Roland MC-101 d’occasion. Pour étoffer ma culture sur le sujet, j’ai demandé à ChatGPT de me faire une playlist (en lui expliquant mes goûts) et j’avoue avoir été séduit par le résultat. C’est à découvrir ici :
Chronologie de la vie de Saul Leiter
- 1923 : Naissance de Saul Leiter le 3 décembre à Pittsburgh, Pennsylvanie. Il est le fils d’un rabbin renommé et érudit talmudiste.
- Années 1940 : Enfance et adolescence marquées par des études religieuses rigoureuses. Il grandit à Pittsburgh et Cleveland, où il commence des études de théologie pour devenir rabbin, conformément aux souhaits de son père.
- 1946 : À l’âge de 23 ans, Saul Leiter quitte le séminaire de théologie à Cleveland, rompant avec les attentes de sa famille. Il s’installe à New York pour poursuivre une carrière artistique, initialement en tant que peintre. À New York, il rencontre Richard Pousette-Dart, un peintre expressionniste abstrait, qui l’encourage à explorer la photographie. Leiter échange des clichés d’Eugène Smith pour acquérir son premier appareil photo, un Leica 1C.
- 1947 : Saul Leiter visite une rétrospective d’Henri Cartier-Bresson au Museum of Modern Art (MoMA) de New York. Cette exposition confirme son désir de devenir photographe. Il commence à photographier les rues de New York en noir et blanc, capturant des scènes urbaines et des portraits.
- 1948 : Leiter commence à expérimenter la photographie couleur, une pratique encore peu courante à l’époque. Il utilise parfois des films Kodachrome périmés pour obtenir des effets uniques. Ses sujets principaux sont les scènes de rue et son cercle d’amis.
- 1953 : Edward Steichen, alors conservateur en chef du département de la photographie au MoMA, inclut 25 tirages en noir et blanc de Leiter dans l’exposition « Always the Young Stranger ». Cette inclusion marque une reconnaissance importante de son travail. La même année, Leiter ouvre un studio de photographie à Bleecker Street, New York, où il se spécialise dans la photographie de mode, de portrait et de publicité.
- 1957 : Steichen inclut 20 photographies couleur de Leiter dans une conférence au MoMA intitulée « Experimental Photography in Color ». C’est une des premières fois que ses travaux en couleur sont présentés au public. Parallèlement, ses photographies de mode en couleur sont publiées pour la première fois par Henry Wolf dans le magazine Esquire . Cette reconnaissance dans le domaine de la photographie de mode marque le début d’une carrière de vingt ans dans ce secteur.
- Années 1958-1970 : Leiter continue à travailler comme photographe de mode, contribuant à des publications prestigieuses telles que Harper’s Bazaar, Elle, British Vogue, Show, Queen, et Nova. Son style pictural, caractérisé par l’utilisation créative des flous, des reflets, et des cadrages non conventionnels, se distingue dans le monde de la photographie de mode.
- 1963 : Leiter déplace son studio de Bleecker Street à la Fifth Avenue, où il continuera de travailler jusqu’en 1981. Ce studio sera le centre de son activité photographique, où il réalisera de nombreux projets de mode, tout en continuant ses travaux personnels.
- 1981 : En raison de difficultés financières, Leiter est contraint de fermer son studio sur la Fifth Avenue. Cette période marque le début de deux décennies de relative obscurité, où son travail reste largement méconnu.
- 2006 : Grâce à l’historien de l’art Martin Harrison et à la galerie Howard Greenberg, son livre Saul Leiter: Early Color est publié par Steidl. Ce livre, qui compile certaines de ses premières œuvres en couleur, connaît un succès immédiat et relance l’intérêt pour son œuvre. La même année, le Milwaukee Art Museum organise la première grande exposition rétrospective de Leiter aux États-Unis.
- 2008 : Saul Leiter connaît sa première exposition muséale en Europe à la Fondation Henri Cartier-Bresson à Paris. Cette exposition marque une reconnaissance internationale de son travail. La même année, il expose également ses peintures pour la première fois en 30 ans à la galerie Knoedler à New York.
- 2012 : Le documentaire In No Great Hurry: 13 Lessons in Life with Saul Leiter, réalisé par Tomas Leach, est présenté dans divers festivals de cinéma. Ce film permet de mieux faire connaître Saul Leiter au grand public et de mettre en lumière son approche unique de la photographie.
- 2013 : Saul Leiter décède le 26 novembre à New York, quelques jours avant son 90e anniversaire. À sa mort, il laisse derrière lui un immense corpus d’œuvres, dont une grande partie reste inédite.
- 2014-Présent : Après sa mort, son œuvre continue d’être redécouverte et célébrée à travers des expositions et des publications. Ses photographies, particulièrement celles en couleur, sont désormais reconnues comme des contributions majeures à l’histoire de la photographie.
Sources
Livres
- Leiter, S. (2005). Saul Leiter : Early Color. Göttingen, Allemagne : Steidl; London, Royaume-Uni : Thames & Hudson.
- Hostetler, L. (2006). In Living Color : Photographs by Saul Leiter. Milwaukee, WI : Milwaukee Art Museum. (Exhibition Gallery Guide).
- Saul Leiter. (2007). Arles, France : Actes Sud. (Collection « Photo Poche »).
- Saul Leiter. (2008). Göttingen, Allemagne : Steidl. (Catalogue d’exposition de la Fondation HCB).
- Sire, A., & Stourdzé, S. (2008). Saul Leiter. Göttingen, Allemagne : Steidl.
- Kozloff, M., & Livingston, J. (2014). Saul Leiter : Early Black and White. Göttingen, Allemagne : Steidl; New York, NY : H. Greenberg Library; Paris, France : P. Remy Studio.
- Leiter, S., & Naggar, C. (2017). In My Room. Göttingen, Allemagne : Steidl.
Films
- Leach, T. (Réalisateur). (2013). In No Great Hurry: 13 Lessons in Life with Saul Leiter [Film documentaire].
Articles en ligne
- Zabajewski, A. (2021, 13 mai). La vie rêvée de Saul Leiter. Le Photographe Minimaliste. Consulter le lien
- Beck, D. (2013, 26 novembre). Saul Leiter : un maître de la couleur s’est éteint. Polka Magazine. Consulter le lien
- Kim, E. (2013, November 4). 7 lessons Saul Leiter has taught me about street photography. Eric Kim Photography. Consulter le lien
- WUWM 89.7 FM – Milwaukee’s NPR. (2016, February 22). Photographer Saul Leiter in his own words: Believing in the beauty of simple things. Consulter le lien
Notes :
- Après, je le dis en passant, mais personnellement j’aime moins. Je préfère avoir l’impression d’être dans la scène, dans l’action, plutôt que dans les baskets d’un observateur lointain. Est-ce qu’on s’en fout ? Oui, un peu, c’est pour ça que c’est une note de bas de page. Et puis, hé oh, c’est vous qui avez cliqué dessus. ↩︎
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