Introduction
Depuis le temps que j’ai ouvert ce Blog, j’ai écrit des billets pour toutes sortes de raisons. C’est parfois parce que le sujet me semble important et essentiel (notamment tout ce qui concerne la méthode et la pratique) ; d’autres fois parce qu’un lieu commun m’agace et que j’ai envie de le traiter, ou tout simplement parce que le sujet du jour m’amuse. Mais dans tout ce fatras de texte lâché sur un coin perdu du web au fil des années, il y en a peu que j’avais autant hâte d’écrire que celui-ci.
Toute cette histoire a démarré par un événement des plus prévisibles mais néanmoins révélateur d’une certaine avancée dans la vie : j’ai eu 30 ans. Où pour le dire de façon plus cosmique : ma carcasse a fait 30 fois le tour du Soleil, soit 30 milliards de kilomètres parcourus à la vitesse de 30km/seconde.
A cette occasion, j’ai eu envie de voyage, mais dans des proportions toutes moindres, tant en vitesse qu’en distance : je suis parti aux Etats-Unis d’Amérique. Le pays du burger et des grosses voitures, mais on y reviendra.
Lors de ce voyage, j’avais emmené du matériel photo ainsi que la ferme intention de revenir avec un projet photo terminé. Du coup, ce billet va vous raconter cette aventure, un texte à mi-chemin entre le récit de voyage et l’analyse d’un projet photographique. De toute façon, les deux sont étroitement liés dans le cas présent et puis, pour ne rien vous cacher, il m’est quand même agréable de varier un peu les formats. Bref, démarrons.
Ps : L'intégralité des photographies se trouve ici : NORLANDO. C'est quand même mieux de les voir avant de lire la suite.
Un peu de contexte
Je suis parti deux semaines aux Etats-Unis. Le plan était très simple : aller à Orlando, y passer une nuit, puis reprendre l’avion pour la Nouvelle-Orléans. De là, louer une voiture et revenir à Orlando pour prendre l’avion du retour. En anglais d’Amérique, on appelle ça un road-trip. Qui a été permis grâce à ces deux engins :
Mis à part le lieu d’arrivée et de départ, je n’avais rien prévu. J’ai suivi les conseils des Américains au fur et à mesure, et j’ai été dans les endroits où tant l’odeur et la température que la nourriture me convenaient.
Au final et après moult errances, le parcours a été : Nouvelle-Orléans > Biloxi > Pensacola > Jacksonville > St. Augustine > Daytona > Orlando. Je suis donc passé à travers la Louisiane, le Mississippi, l’Alabama (je n’y suis resté qu’une heure, un record) et la Floride.
Ah, et quitte à mentionner la nourriture, autant y aller à fond. C’est une question qui revient souvent quand on parle de photographie de voyage : est-ce que l’on ne doit faire que ça ? Ne s’intéresser qu’à notre projet photo au détriment du reste ?
Eh bien dans mon cas, la réponse est non. Je photographie aussi comme un bon vieux touriste et ça concerne beaucoup la nourriture (je vous épargne les images du reste). Tout est différent et c’est assez amusant. Je vous laisse savourer ce florilège d’images gustatives.
Notez qu’à la Nouvelle-Orléans, tous ces repas se sont faits avec comme fond sonore du bon vieux jazz, comme en témoigne la vidéo ci-dessous.
Enfin, mention spéciale à cette affiche qui m’a beaucoup fait rire. Le bite squad qui livre ton plat préféré sur le pas de ta porte, c’est cocasse.
Bon, tout ça, c’était pour vous donner le contexte général et l’ambiance autour de ce projet photo. J’étais seul (ma compagne n’ayant pas pu prendre ses vacances à la même date) et joyeusement perdu dans un pays dont j’ignorais quasiment tout. Avec ma voiture j’allais de ville en ville, en photographiant ce qui m’intéressait au passage et c’est de ça qu’il va être question désormais.
L’idée de base
Je ne vais pas vous mentir et vous dire que je savais exactement ce que je voulais en partant en voyage, c’est plus subtil que ça. J’avais des idées, des envies et des influences, mais rien qui ne ressemble de près ou de loin à une to-do list à compléter afin de revenir avec les images que je voulais.
Pour être précis, j’avais envie de couleurs à la Joël Meyerowitz (j’ai toujours apprécié sa façon de photographier la côte), du sens du voyage et de la façon de transmettre son regard de Shore, et il va sans dire que William Eggleston et sa façon de photographier la lumière et le quotidien du sud des Etats-Unis étaient aussi dans un coin de ma tête.
D’ailleurs, en parlant d’Eggleston, une de ses citations m’a beaucoup guidé concernant la méthode (et doit bien expliquer la moitié de ma façon de faire) :
Je suis en guerre avec l’évidence
William Eggleston
Je ne voulais pas photographier l’évidence. Je ne souhaitais surtout pas rapporter l’image classique et éculée du pays des grosses voitures, des Américains obèses et des paysages extraordinaires. A l’inverse, je voulais me laisser guider par ce que j’avais envie, moi, de photographier. En ça, c’est une approche qui est liée au courant de conscience (un mouvement littéraire) dont le but est de traduire par l’écrit (ici par la photographie) la pensée du personnage principal, son monologue intérieur. Cela a notamment déjà été appliqué par Robert Frank pour son livre Les Américains.
Ainsi, s’il est vrai que je n’avais pas d’idée précise en partant de ce que je voulais rapporter, j’avais au moins des influences pour me guider et une méthode stricte : suivre ma petite voix intérieure, « photographie ceci, ne photographie pas cela », à laquelle je me suis tenu. Ensuite, l’essentiel du projet s’est défini lors de l’édition qui consistait à me rapprocher le plus possible de ce monologue interne en évinçant le reste. Mais ça, on le verra un peu plus tard.
Influence(s)
Avant de passer à la suite, je vais faire un petit point sur les influences en photographie. J’en parle assez régulièrement en échangeant avec l’audience : certaines personnes ont peur d’être influencées en se cultivant à l’histoire de la photo et de ne plus être « elles-mêmes ». En vrai c’est quelque-chose auquel je ne crois pas du tout, je suis certain que votre culture vient nourrir votre pratique, sans jamais la corrompre. Sauf si bien évidemment vous avez décider de ne baser votre carrière que sur la copie, mais même si quelques noms me viennent à l’esprit, il n’en sera pas question ici.
On va prendre 3 exemples. Dans le premier, ci-dessous, l’influence est clairement assumée. La photographie a été prise derrière l’hôtel où je séjournais à St. Augustine. Le gravier et la voie ferrée remplacent la voie piétonne de la photo de Gursky, mais en prenant l’image, j’avais la sienne dans un coin de ma tête. Il faut voir ça comme un clin d’œil amusé à un artiste qui m’a beaucoup influencé par son sens de la grandeur et de la composition. Après ça s’arrête là, les couleurs ne sont pas les mêmes, et surtout, je ne ferai jamais de tirages similaires (je préfère les petits formats aux gigantesques de Gursky).
Deuxième influence, plus amusante celle-là : Joël Meyerowitz. J’ai toujours apprécié son travail, mais j’ignorais tout de son projet Bay/Sky (dont la photographie ci-dessous est extraite) avant d’acheter le livre à St. Augustine. Ce qui est assez drôle, c’est que la photographie qui est similaire dans mon projet a été prise à Biloxi… quelques jours avant. Comme quoi, quand on a des goûts similaires et qu’on passe par des lieux similaires, on peut être tenté d’avoir la même approche.
Enfin dernier exemple : ces deux photographies représentant un arbre. Avant de faire la recherche pour le billet, je n’avais jamais vu l’image d’Eggleston (bien que j’apprécie beaucoup son travail et que j’ai déjà quelques livres de lui). M’intéresser à son oeuvre m’a appris à aimer la lumière du sud, le banal et les compositions très centrées. C’est sans surprise que l’on peut sentir cette influence sur la ligne d’arrivée.
Tout ça pour dire que les influences que nous avons nous marquent, nous guident et laissent des petites similarités (que l’on découvre parfois après coup, quand on est familier du travail d’un photographe), mais ne nous corrompent pas pour autant. Faire ce que l’on aime, c’est aussi parfois faire un peu de ce que l’on a aimé, et c’est normal.
Si le sujet vous intéresse je vous invite à lire Influences: un jeu photographique, de Jean-Christophe Béchet que je présente dans l’article ci-dessous.
Le titre
Bon, j’avoue qu’il semble plus logique de parler du titre d’un projet une fois qu’on l’a réalisé. Mais dans le cas présent, j’avais le titre avant même de quitter le territoire français. Le but de ces photographies, c’était de retranscrire la vision d’un type qui découvre un pays, seul, pendant deux semaines (et en l’occurrence, le type, c’est moi). N’ayant pas la prétention de révolutionner la vision qu’a le monde des Etats-Unis, j’envisageais plus un titre qui contenait la notion de voyage qu’un énième « This is America ». Les Etat-Unis ça reste un pays immense, très contrasté et complexe, et il m’aurait fallu beaucoup plus de temps.
Et c’est donc là qu’est venu le nom : NORLANDO. En fait c’est tout bête, les habitants de la Nouvelle-Orléans (dites « New-Orleans »), appellent leur ville NOLA. Je ne sais pas d’où ça vient, mais c’est comme ça. Et moi, j’allais donc de NOLA à Orlando, et quand on contracte les deux, ça fait NORLANDO, et on est bon.
Au passage, si vous vous posez des questions sur la façon de choisir les titres pour vos travaux, je vous raconte tout ici :
Réalisation
Il est temps d’aborder la réalisation du projet. Parce qu’avoir des idées et des envies c’est bien, mais encore faut-il aller les photographier et c’est tout le sujet de cette partie. Les making-of, je les fais toujours dans un souci d’ouverture et de transparence. Je me dis que mes erreurs, mes questionnements et mes essais à moi peuvent aider mon prochain à faire son projet (et aussi qu’à une époque j’aurais bien aimé trouver ce contenu, donc je le fais à mon tour). Bref, c’est le seul endroit où je parle de matériel, parce que forcément, j’en utilise certains et pas d’autres pour aboutir à ce que je veux. Pour ce projet j’ai donc utilisé :
- Un sac Paul Marius Petit reporter. J’en parle pour deux raisons : autant j’en ai rien à carrer du matériel, autant je suis un peu une fashion victim de la photo et j’aime bien avoir des sac et sangles qui soient jolis. L’autre raison, c’est que j’ai littéralement trimbalé ce sac partout pendant 15 jours et qu’il ne m’a jamais fait défaut. Bon après, chargé, c’est un peu lourd sur l’épaule mais je me déplaçais principalement en voiture.
- Mon fidèle Fujifilm X-Pro2, avec un 23mm F/2, un 35mm F/2 ainsi qu’un petit flash EF-X20. Je comptais utiliser ce dernier pour faire des portraits au flash dans les bars (un peu à la Bruce Gilden) mais finalement je ne m’en suis jamais servi, je me suis contenté de déguster des pintes de stout (ma bière préférée !) en papotant avec les locaux. Quant aux objectifs, je les ai utilisés plutôt indifféremment, sauf le 23mm dont je me sers beaucoup en photo de rue.
- Un Yashica Mat 124G. Étonnement, j’avais acheté un Nikon F100 en rentrant de vacances l’année dernière pour avoir un appareil argentique efficace à emporter en vacances, mais au moment de partir j’ai préféré emmener le moyen-format (comme il était très différent de mon numérique, je me suis dit que je pourrais faire plus de choses). Le Yashica est un appareil moyen-format argentique, à visée TLR, personnellement j’adore. Si vous voulez en apprendre plus, je vous renvoie vers cet article.
- Une cellule à main Lunasix 3. Bon, pour le coup je l’ai trouvée à la braderie de Lille pour 3 francs six sous et je ne regrette pas du tout. La cellule du Yashica mat est très bien pour les scènes « simples », mais dans les situations contrastées elle a tendance à privilégier les hautes lumières. On se retrouve vite avec des ombres bouchées et en argentique, c’est la cata. La cellule permet de s’en sortir dans toutes les situations (surtout qu’elle n’est pas limitée à 400iso comme celle du Yashica et qu’elle permet de mesurer la lumière incidente, pratique !).
- Le plein de pellicules. J’en ai pris environ trois fois plus que ce que j’ai utilisé mais bon, autant viser large (pour ce que ça pèse). Tant en France qu’aux USA, je n’ai eu aucun problème pour obtenir des contrôles manuels lors des contrôles de sécurité. J’ai pris avec moi :
- De la Portra 400, ma pellicule « à tout faire ».
- De la Ektar 100, pour les scènes très lumineuses. Les jours où j’allais à la plage, avec le sable blanc qui réfléchissait beaucoup la lumière, c’est très pratique.
Ps : Veuillez noter que j'ai utilisé ce matériel parce qu'il correspondait à mes besoins, mes envies et mon budget. Je ne tiens absolument pas à avoir de débats sur le sujet. Utilisez ce qui vous convient, ça sera merveilleux aussi.
Du coup me voilà, avec cette tête là, à parcourir le Sud des USA :
Pour l’anecdote, il y a eu un moment un peu gênant. Avec Richie Lem’, on est parti en voyage en même temps et chacun à un bout du monde différent (l’Asie pour lui, l’Amérique pour moi). On avait pour projet de shooter de la diapositive et de la développer nous-mêmes en rentrant (c’est beaucoup moins coûteux). Sauf qu’au moment de partir je me suis trompé, j’ai embarqué l’Ektar au lieu de la Provia 100F. Et ça, je m’en suis rendu compte en changeant de pellicule, j’étais à la plage de Pensacola, dans la voiture pour éviter le vent et le sable, la climatisation coupée pour éviter de déplacer des poussières partout, et il faisait un bon 40° : bref, j’ai eu chaud comme jamais. Une petite photo souvenir du moment fatidique pour l’occasion :
Bon, tout ça c’est bien joli, mais clairement ça ne sert à rien si ça reste au fond de la valise. Du coup, pour obtenir ces images (et les autres que vous verrez après), j’ai procédé de la façon suivante :
- J’avais mes appareils tout le temps sur moi, qu’il pleuve, qu’il vente, ou qu’il neige (c’est beaucoup plus rare en Floride quand même).
- Je me suis beaucoup promené (à pied ou en voiture) un peu au hasard, et j’ai photographié ce qui m’interpellait, sans hésiter. Toujours avec la même logique : autant prendre la photo et se décider après. Et ça, même avec le moyen format argentique, dont une photo coûte environ 1,60€ (pellicule, développement et scan inclus). C’est un peu une peur que l’on a au début : chaque photo coûte et on a tendance à se demander si ça « vaut vraiment le coup de déclencher », mais bon, quitte à acheter et emmener du matériel, autant s’en servir.
- Je déchargeais tous les soirs les images de l’appareil numérique sur Dropbox, la sauvegarde dans le cloud ça reste le plus efficace (aucun risque de vol, perte ou détérioration du support de stockage). Les motels avaient souvent une assez bonne connexion Wi-Fi pour le permettre.
Concernant l’usage à proprement parler des appareils :
- J’ai utilisé le numérique pour les photographies d’ambiance / de paysage urbains et la photographie de rue. Souvent, je m’en sers en priorité ouverture en utilisant des presets ISO qui sont des sortes de « bornes » : 1/250e min et 6400iso max pour la photographie de rue 1/80e min et 6400iso max pour le reste. Ensuite je le laisse se débrouiller.
- Le Yashica pour le paysage urbain / paysages / ambiances. Sa cellule étant un peu capricieuse, je m’en servais quand la scène était peu contrastée, sinon j’utilisais la cellule avec une mesure de lumière incidente. Je suis très satisfait des négatifs obtenus qui étaient parfaitement exposés comme ça. Clairement, la cellule m’a sauvé les miches dans les situations compliquées.
- J’ai aussi pris un trépied avec moi (au cas où je me retrouvais avec la Ektar 100iso chargée le soir), mais c’était inutile. Je ne m’en suis servi qu’une fois et ça encombre la valise. La prochaine fois, je ferai sans (soit avec un mini trépied, soit juste en posant l’appareil sur un truc qui traîne).
Edition
L’édition, c’est l’étape qui comprend toutes les tâches entre « j’ai plein d’images dans un coin » et « j’ai un projet fini et cohérent ». C’est clairement celle que je préfère dans le travail photographique. C’est à ce moment que l’on peut amener un projet vers un point A ou le tirer légèrement vers un point B. Si le sujet vous intéresse et que vous voulez un peu de méthode, je vous invite à regarder cette vidéo :
Avant d’obtenir un lot d’images à éditer, il a fallu les traiter. Parce que bon, je photographie certes en RAW+JPG (j’utilise ces derniers assez souvent pour la photographie perso/familiale) mais j’aime bien triturer un peu les images à ma sauce pour les projets plus sérieux. Pour obtenir les images finales :
- Pour le numérique, j’ai développé les RAW sous Lightroom. Depuis le projet AdieuParis j’ai un petit preset à moi que je réutilise souvent (les couleurs et contrastes correspondent bien à ce que j’aime, et ça permet d’avoir une production « stable » visuellement). Je corrige juste l’exposition ensuite et parfois l’orientation des images si elles ne sont pas totalement droites.
- Pour les pellicules, je les ai données au Laboratoire Photolix à Lille. Ils se sont chargés du développement et du scan, puis m’ont rendu une belle bande par négatif, que j »ai découpée et rangée dans des pochettes (c’est mon petit plaisir à moi). Je demande le scan en 4k (4000 pixels de côté) sur le Fuji Frontier (c’est celui qui a le rendu que je préfère), et avec un scan « wide », qui permet de voir les bords du film et de recadrer précisément comme je veux. Le Yashica ne fait pas des images exactement carrées, c’est plus pratique comme ça. En tout cas, ils ont fait un super boulot sur mes petits négatifs chéris, je ne peux que vous recommander d’y aller. Sous Lightroom je ne fais que recadrer, corriger l’orientation si besoin et un peu l’exposition quand c’est nécessaire (je ne touche pas aux couleurs, j’aime rester proche de celles du film).
- Je n’ai pas spécialement travaillé à faire coïncider le rendu des images argentiques et numériques pour plus de cohérence, ça s’est fait assez naturellement (grâce à mon super preset de la mort qui est déjà proche des rendus que j’aime et donc un peu « argentique »).
Une fois que l’on a fini de traiter les images, on peut passer à l’édition, et la fête commence. Je ne vais pas revenir sur la façon dont je procède pour le tri à proprement parler (qui est détaillé dans la vidéo) mais uniquement sur les choix que j’ai faits à ce moment là.
Le but du jeu, je le rappelle, c’était de me rapprocher le plus possible de ce que moi j’ai perçu des USA en m’y promenant deux semaines. J’ai d’abord commencé par sortir deux « blocs » d’images, qui ne cadraient pas avec ça.
Le premier, c’est des photographies qui iront un peu plus tard dans le projet InColors, c’est une série ouverte, sur la couleur en milieu urbain, que je complète petit à petit. Je dois y rajouter des images une fois par an environ. Je préférais garder ce projet séparé que de le voir mélangé dans NORLANDO. Du coup, et même si je les aimais bien, j’ai supprimé ces images :
De même, j’ai supprimé les photographies de rue de l’édition finale. Alors ça m’a fait mal au cœur, parce que j’y ai passé beaucoup de temps (environ la moitié des photographies prises au numérique étaient des photographies de rue), mais c’était mieux comme ça. En fait, j’ai fait beaucoup de photos de rue au tout début du projet (à la Nouvelle-Orléans) et à la fin (à Orlando), parce que j’étais en milieu urbain. Le reste du temps j’étais dans des villes plus petites, plus périphériques, sans réel centre et ça n’est pas du tout l’idéal pour pratiquer. C’est lié au fait que l’on se déplace difficilement à pied aux USA (tout est fait pour la voiture, il n’y a que les SDF et les types paumés comme moi qui tentent de marcher) ce qui rend très compliqué la photographie de rue.
Du coup, comme les images n’étaient pas représentatives de ce que j’avais vu aux USA (elles ne montrent que le tout début et la toute fin), et qu’elles détonnaient un peu avec le reste, j’ai préféré les supprimer. Petit florilège de ces petits anges partis trop tôt :
Bon, on en arrive au moment où l’on va parler de chiffres. J’avais environ 1 000 photographies numériques pour ce projet, et 84 à l’argentique. Une fois les étapes que je viens de vous décrire passées, il m’en restait une soixantaine.
C’est là que l’on passe à l’étape des bouts de papier. Grossièrement, il s’agit d’imprimer ses images sur du papier de bureau (de préférence en petit), de les découper et de peaufiner l’édition en manipulant les images. C’est assez difficile à faire avec un ordinateur parce qu’il est plus compliqué de réorganiser les images, de voir ce qui marche, d’en enlever, remettre, bouger, etc. Pour ce travail-là, le papier facilite vraiment le travail et ça coûte trois fois rien.
Une fois tout ce travail effectué, on arrive à la sélection finale des 43 images que j’ai retenues. Cela donne :
- 24 images sur les 1 000 prises au numérique.
- 19 sur les 84 prises à l’argentique.
Bon, on se rend vite compte que le fait d’utiliser un appareil qui demande beaucoup plus de réfléchir, ça aide (2,4% contre 22%, j’ai gardé 10 fois plus d’images au Yashica en proportion ). Forcément, on ne fait pas 50 versions d’une photo pour choisir après.
D’ailleurs, pour l’anecdote, il n’y a qu’une fois où j’ai fait 2 fois la même image au Yashica, c’était parce que la lumière venait de changer.
Ce que je dis souvent c’est qu’une bonne édition, ça doit faire mal. Et là, ça a été le cas en retirant des éléments qui me plaisaient mais qui ne faisaient pas sens. Pour résumer :
Une édition, c’est comme une épilation, si ça ne fait pas un peu mal, c’est que tu n’enlèves rien d’important.
Thomas Hammoudi
Le livre
Il est désormais temps de parler de bouquins. Bon avant de vous présenter ce que j’ai fait avec ces images, voici les livres que j’ai rapportés des USA (comme d’habitude, listés dans la bibliographie) :
Rapporter des livres c’était à la fois une très bonne idée (le livre sur la photographie du sud des USA, New Souther Photography est très difficile à trouver en Europe, et Bay/Sky est la première édition du livre de Jöel Meyerowitz) et une très mauvaise vu ce que ça m’a coûté à l’aéroport.
Bref, plus que de rapporterdes bouquins, j’ai eu envie d’en faire un pour moi. C’est quelquechose que j’aime bien faire, je les range dans ma bibliothèque et ça fait un objet que l’on garde de ce travail. Après, les livres photo personnels ont l’inconvénient de figer le travail et d’empêcher les modifications ultérieures, mais bon, maintenant je fais aussi des tirages que je range dans des boites d’archives (ça fait du stock pour les montrer, les offrir, les lectures de portfolio et Cie). Le meilleur des deux mondes en somme.
Pour ce livre j’ai eu l’occasion de tester la nouvelle gamme de livres professionnelles de Saal Digital. J’en avais déjà parlé sur la page Facebook lors de précédents tests : j’aime bien ce qu’ils font, c’est propre, carré et les tarifs sont abordables (je trouve le rapport qualité/prix de toutes les gammes très bon). Pour faire le livre, ça s’est passé en 3 étapes :
- J’ai réalisé une première maquette du livre via leur logiciel. Bon, il est parfois un peu casse pied (il n’y a pas de fonction annuler, donc quand on teste une mise en page et que l’on veut revenir en arrière on est obligé de refaire ce que l’on avait fait). Mais globalement, la mise en page est assez simple, il y a plein de modèles et il cale les images tout seul comme un grand.
- Une fois que c’était fait, j’ai fait un export PDF du document, je l’ai envoyé à quelques personnes (3, ça suffit) à qui je fais confiance tant pour la qualité de leurs avis que leur capacité à me dire quand un truc est naze.
- Après avoir modifié le séquencement quelques fois (l’édition est un travail itératif), j’ai imprimé le livre sur du papier de bureau (paper for ever!), pour vérifier une fois l’objet en main que l’enchaînement se faisait bien. Encore une fois, j’ai fait quelques modifications et ensuite on était bon pour commander.
Je vous mets quelques photos de la bête ci-dessous.
Si vous voulez tester les produits de Saal vous aussi, vous pouvez utiliser ce code promotionnel : f88vkbMugu-THU, il vous donne droit à 10% de réduction sur votre commande. Il est valable jusqu’à la fin des temps (ou au pire, jusqu’à l’effondrement de la société capitaliste).
De même, si vous souhaitez acquérir un exemplaire du livre, vous pouvez m’envoyer un message via le formulaire de contact (je préviens tout de suite qu’ils sont assez coûteux, il s’agit d’une gamme professionnelle, et produits uniquement sur commande). Comme d’habitude, il est aussi possible d’acquérir des tirages via cette page, numérotés et signés par votre serviteur.
Pour finir, et comme ma bonté ne connaît aucune limite, vous pouvez télécharger mes fichiers intermédiaires (planches contact, maquettes du livre) via le bouton ci-dessous. Cela vous permettra de voir les coulisses du processus que je viens de décrire, en espérant que ça vous aide pour vos travaux à vous.
Conclusion
Comme toujours, j’espère que ce retour d’expérience vous aidera pour vos travaux à vous et vous éclairera sur ce que j’ai voulu faire de ces images. Partager mon travail, c’est toujours un moment important, vu que je le fais rarement (une fois par an environ). Je considère que le temps a une part très important dans le résultat final et pour ma part ça ne va pas aller en s’arrangeant. NORLANDO a été fait à l’occasion d’un voyage, j’ai encore une série ouverte (InColors) où je publie de temps en temps, et pour le reste… je compte m’y consacrer quelques années avant de montrer quelquechose 🙂
N’hésitez pas à me raconter comment vous faites vos projets ou à poser vos questions en commentaires, je me ferai un plaisir d’y répondre.
Et si ça vous intéresse, j’en raconte plus sur le projet ici :
Et merci à ceux qui se reconnaîtront, pour leurs conseils pendant ce travail ;)
Pendant l’écriture de ce billet, j’ai énormément écouté cet album (une merveille dans ce monde de brutes). Je conseille les titres Diamond Lost et Chemical.
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